Le premier manager du Holding GETEX, conforté par un bilan positif de la gestion depuis ces deux dernières années, évoque, dans cet entretien, les efforts consentis pour mobiliser tous les acteurs concernés afin de redresser le secteur dont le caractère stratégique n’échappe pas aux pouvoirs publics qui accompagnent ce processus pour réhabiliter une activité économique qui avait pignon-sur-rue dans le tissu industriel algérien. Notre interlocuteur aborde, à ce titre, les axes stratégiques de développement du Groupe, en l’occurrence l’institutionnel, le grand public et l’international. Il se félicite du partenariat algéro-turc, explique le choix de se lancer dans le recyclage et souligne le rôle fédérateur des dernières assises nationales des textiles et cuirs. Conscient des difficultés et des réalités endogènes et exogènes, le P-DG de GETEX affiche une confiance à toute épreuve et une volonté d’aller de l’avant qui n’a d’égale que la dimension de l’ambition qu’il nourrit pour le Groupe aux destinées duquel il préside.
Interview réalisée par Hacène Nait Amara
Vous allez bientôt boucler une année à la tête du Holding GETEX. Quel bilan faites-vous de vos réalisations durant cette période ?
Le bilan est plutôt positif, en ce sens que plusieurs actions et projets ont été engagés, en vue d’amorcer un redressement et une relance des activités des entreprises détenues en portefeuille.
Ces mesures, qui touchent tous les aspects de la gestion ont été définies à partir d’un état des lieux que nous avons établi, dès mon installation à la tête du Holding GETEX. Il reprend tous les aspects positifs qu’il y a lieu de consolider et les points négatifs qu’il faut corriger. Nous avons, pour ce faire, élaboré une feuille de route adossée à un planning d’exécution, laquelle est actuellement en cours de mise en œuvre.
Par ailleurs, nous nous sommes attelés à poursuivre les actions engagées auprès des Pouvoirs Publics afin de bénéficier de leurs soutien et accompagnement pour la relance de ce secteur, ô combien stratégique à plus d’un titre. Lesquelles actions ont trouvé un écho favorable auprès de ces derniers.
Nous sommes conscients que la tâche sera rude mais nous sommes tout à fait convaincus que cela est à notre portée et nous sommes confiants par rapport au fait que le secteur des textiles et cuirs retrouvera la place qui est la sienne dans le tissu économique et industriel du pays. Nous sommes tous engagés et mobilisés pour la réussite de notre ambitieux projet.
Les pouvoirs publics veulent relancer l’industrie des textiles et cuirs sur la base d’une nouvelle stratégie. Peut-on connaître les principaux axes de la stratégie arrêtée par GETEX ?
En effet, les pouvoirs publics accordent une attention particulière au devenir de ce secteur qui comptait, jadis, parmi les fleurons de l’industrie nationale. Nous saisissons d’ailleurs cette occasion pour exprimer toute notre gratitude aux décideurs pour tout leur soutien et leur accompagnement qui ne font que renforcer notre engagement pour la relance de cette industrie.
Pour revenir à la stratégie de développement que le Holding GETEX a tracée, celle-ci tourne autour de trois principaux axes. Le premier concerne la consolidation du segment institutionnel. Comme vous le savez, le Holding GETEX est le principal fournisseur, voire le fournisseur historique des clients institutionnels, en articles textiles, habillement et cuir. Notre objectif est d’optimiser davantage nos capacités de développement des articles « techniques » et de satisfaire leurs exigences et leurs demandes. Les clients institutionnels sont très exigeants sur le plan technique et nos nombreux échanges commerciaux et collaborations ont permis à nos ingénieurs et techniciens de développer une expertise pour la réalisation de beaucoup de supports et produits de qualité. Le deuxième axe concerne la reconquête du marché « grand public ». Après avoir disparu du marché national pendant de nombreuses années, pour des raisons que tout le monde connaît et sur lesquelles je ne vais pas m’attarder, liées à des conjonctures particulières, le Holding GETEX ambitionne de reprendre sa place sur le marché local par la mise à disposition, au profit des consommateurs algériens, de produits de qualité qui répondent à leurs besoins et aux tendances de la mode. Depuis quelques années maintenant, nous fournissons certains produits à travers notre réseau de distribution qui ont été accueillis avec satisfaction par les consommateurs. Même si, en termes d’offre et de diversité, cela s’avère insuffisant par rapport à ce qu’ont connu les consommateurs par le passé et par rapport aussi au potentiel industriel dont disposent nos entreprises, à la faveur du plan de développement consenti par les pouvoirs publics, il n’en demeure pas moins que tous les efforts sont axés sur la reconquête de ce segment de marché et que les actions entreprises ou à entreprendre sont clairement définies. Nous sommes encouragés par les retours de la clientèle qui souhaite ardemment s’habiller en « made in bladi » et qui considère, à juste titre d’ailleurs, que les produits issus de la production nationale sont d’excellente qualité en termes de matières premières. Nos entreprises accordent un point d’honneur à n’utiliser que des matières premières nobles.
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Quant au troisième axe, celui-ci concerne la conquête des marchés internationaux que nous considérons, en toute modestie et objectivité, à la portée de nos entreprises, particulièrement dans le contexte international actuel qui joue plutôt en notre faveur, au regard de tous les avantages comparatifs que le pays offre.
Cependant, il va sans dire que cela nécessite un train de mesures pour préparer nos entreprises à la pénétration de ces marchés difficiles d’accès et que nous souhaitons concrétiser à travers la réalisation de relations partenariales avec des opérateurs industriels étrangers, dont la recherche est actuellement en cours soit à travers l’intensification de nos participations aux différents évènements économiques et commerciaux nationaux et internationaux, soit à travers des contacts établis avec les différentes ambassades identifiées, installées en Algérie.
Il y a lieu de souligner que le facteur humain est considéré comme la pierre angulaire pour mener à bien la stratégie de développement et de relance tracée par la Holding GETEX. Quel que soit le degré d’automatisation des équipements industriels, « l’humain » demeure incontournable dans une industrie manufacturière comme celle des textiles et cuirs. Nos entreprises ont malheureusement connu, ces derniers temps, une déperdition de la qualification technique de leurs personnels. C’est pourquoi, nous avons décidé d’accorder toute l’attention et l’importance à ce facteur. Afin d’y remédier et de mettre à niveau notre ressource humaine, de nombreuses actions sont déjà engagées, notamment, dans le cadre de la formation, à l’instar des conventions de formations signées avec le GACU ou notre partenaire turc au niveau de la société TAYAL, pour ne citer que celles-ci. Ceci nonobstant les contacts établis auprès de certaines universités pour la prise en charge de nos besoins en la matière, et ce, par la mise en place de programmes académiques dans l’enseignement supérieur dédiés aux métiers de la profession, l’objectif étant d’assurer une adaptation et une proximité avec l’environnement professionnel. En effet, depuis la restructuration de l’INIL devenu, en 1987, INIM, puis absorbé en 1998 par la création de l’université de Boumerdès, il n’y a plus eu de structures de formation dans les métiers du textile, par exemple. Si je prends le cas des métiers du cuir, il existe au niveau national, un seul centre de formation professionnelle situé à Messad (Djelfa) qui, malheureusement, ne répond pas aux besoins de cette branches industrielle.
Le Ministère de l’Industrie a organisé, récemment, des assises nationales consacrées au secteur des textiles et cuirs. Quelles conclusions tirez-vous ?
Tout d’abord, permettez-moi de réitérer mes vifs remerciements à Monsieur le Ministre de l’Industrie pour cette louable initiative, à laquelle nous adhérons pleinement.
Cet évènement nous a d’abord permis de nous connaitre entre nous, nous opérateurs économiques activant dans ce secteur. Cela nous a, également, permis d’identifier notre potentiel et nos capacités, chacun dans son domaine. Tout comme cela a permis de cerner les problématiques et les solutions susceptibles de redresser la situation.
Nous avons apprécié le cadre d’échange intellectuel qui a été mis en place à cette occasion et nous espérons pouvoir collaborer davantage, par le retour d’expérience de chaque opérateur, pour le bien du secteur. Idéalement, nous souhaitons que ce cadre d’échange de soit pas conjoncturel et nous avons pour ambition la mise en place d’organisations professionnelles fortes pour contribuer à structurer et organiser nos activités. Nous avons tous, chacun dans son domaine et selon son expérience, une pierre à apporter à l’édifice.
Comment évaluez-vous, aujourd’hui, le partenariat algéro-turc au niveau de la société TAYAL ?
Le Holding GETEX, à travers ses filiales actionnaires, entretient d’excellentes relations avec le turc Tayal. Le partenariat portant sur la création du pôle industriel des textiles de Relizane est un projet stratégique et structurant pour l’activité. Cela d’autant qu’il a été concrétisé avec un opérateur industriel aux références solides en la matière.
Conjugué au potentiel et aux perspectives de la Holding, ce projet d’envergure contribuera à la réduction de la facture des importations en articles textiles et habillements par la satisfaction d’une partie de la demande nationale en produits de qualité, et à la promotion des opérations d’exportation telles que décidée par les pouvoirs publics. Ceci, sans omettre l’aspect social étant donné que dans sa première phase, il est question de créer 10.000 emplois.
Pouvez-vous nous parler de l’activité export de GETEX et ses perspectives ?
Comme je l’ai souligné précédemment, l’exportation de nos produits est un axe de développement stratégique que le Holding GETEX a retenu. A la faveur de nos participations à différents événements économiques internationaux, il nous été donné de constater un intérêt manifeste pour notre gamme de production.
Cependant, cela nécessite certains préalables sur lesquels nous avons commencé à nous pencher pour pouvoir concrétiser cela.
Je puis déjà dire que nous sommes en pourparlers avec d’éventuels partenaires étrangers pour réaliser des opérations dans ce sens, dont certaines sont actuellement en cours, vers des pays africains, grâce aux nouvelles mesures incitatives en la matière, initiées par les pouvoirs publics et la mise en place de la ZLECAF qui a créé une nouvelle dynamique commerciale sur le continent.
Nous ambitionnons de pénétrer les marchés internationaux et nous sommes engagés à le faire.
Le Holding s’est engagé dans le domaine du recyclage. Pourquoi ce choix et quels sont les projets phares prévus ?
En effet, nous sommes engagés depuis quelques années dans le domaine du recyclage. Dans notre activité, l’économie circulaire existe déjà, ce n’est pas un concept.
Nous avons dans notre portefeuille une entreprise située à Sidi-Aïch dans la wilaya de Béjaïa qui a fait de l’activité de recyclage son domaine de prédilection. Les déchets textiles sont récupérés d’un peu partout dans le pays, traités et transformés en produits.
Par ailleurs, un autre projet est en cours de maturation avec notre partenaire turc pour le recyclage des déchets textiles destinés à la production de filés coton pour la confection des pantalons jean’s.
Nous avons aussi réalisé un nouveau projet innovant en Algérie, qui porte sur la valorisation des déchets solides de cuirs et leur transformation en fertilisants agricoles. La nouvelle unité entrera en production, d’ici à la fin du mois de mars. Les essais techniques sont en cours en collaboration avec les services concernés relevant du Ministère de l’Agriculture et les premiers résultats sont très concluants. Le procédé a été acquis auprès d’un détenteur italien de la technologie avec lequel nous collaborons étroitement pour la réussite du projet. Il est d’ailleurs question d’exporter ces fertilisants bio vers les marchés européens. Ceci, sans omettre de citer notre contribution dans la collecte des peaux animales, issues du sacrifice de l’Aïd El Adha qui s’inscrit aussi dans ce cadre.
Nous considérons que nous avons une responsabilité sociétale et tenons à contribuer aux enjeux du développement durable et en tant qu’opérateur économique, nous accordons une grande importance aux aspects liés à l’économie circulaire dont le recyclage est un des fondamentaux en ce sens qu’il permet, entre autres, de sécuriser les approvisionnements et de diminuer les impacts néfastes sur l’environnement.
H. N. A.