La Satim est un acteur incontournable du secteur de la monétique en Algérie. Dans cette interview, Nawel Benkritly, DG de la Satim, explique le pourquoi du report au 31 décembre 2023 des délais de la généralisation des TPE au niveau des espaces commerciaux. Mais pas seulement. Nawel Benkritly, revient sur certains services et outils monétiques lancés depuis peu par la Satim et le taux d’avancement de ces projets.
Interview réalisée par Hacène Nait Amara
La pénurie mondiale de semi-conducteurs semble se résorber progressivement, ce qui contribuerait à répondre à la demande des puces électroniques et à faire baisser les prix. Est-ce une bonne nouvelle pour vous ?
Bien entendu c’est une bonne nouvelle, nous espérons que les fabricants de cartes pourront dans le futur répondre plus rapidement à la forte demande internationale et plus précisément à la demande de l’Algérie qui avoisine pour les seules banques plus d’Un million de cartes annuellement et cela sans compter les cartes d’Algérie Poste.
Il faut toutefois relativiser car le retour à la normale prendra du temps. Par conséquent, il est très important pour la place bancaire algérienne de faire ses prévisions d’émission de cartes pour les trois prochaines années au moins afin de procéder au lancement des commandes suffisamment à l’avance car les délais de livraison restent longs.
En ce qui concerne le prix, il reste proportionnel à la technologie qui évolue sans cesse et inversement proportionnel à la volumétrie commandée. De ce fait, les prix ne connaitront pas vraiment de baisse pour les prochaines commandes mais bien au contraire une sensible hausse qui entrainera forcément des coûts additionnels pour le secteur bancaire. D’où l’intérêt de produire nos cartes localement ce que font déjà deux opérateurs nationaux.
Le délai de la mise en place des instruments de paiement électronique, au niveau des espaces commerciaux, a été prolongé au 31 décembre 2023, en vertu de la loi de finances complémentaire pour l’année 2022, publiée au Journal officiel n° 53. Pourquoi cette mesure a-t-elle été prise ?
La situation générée par la pandémie du Covid 19 a ralenti le processus de généralisation des moyens de paiement électronique. D’une part, les commerces ont été fermés de long mois, d’autre part, les usines de fabrication de TPE, de DAB et de cartes ont été ralenties rendant moins disponibles ces équipements.
De même, les transports de ces marchandises au niveau international ont été impactés aussi bien en termes de délais que de coûts.
Depuis quelques mois, la situation tend à se normaliser et les démarches de généralisation de ces moyens de paiement ont été reprises à plusieurs niveaux : production nationale de TPE, acquisition de DAB/GAB, acquisition de cartes de paiement afin de permettre aux institutions financières de les déployer en masse sur tout le territoire national qui compte un très grand nombre de commerçants et d’agences bancaires et postales.
Cette mesure permettra d’atteindre la disponibilité nécessaire de ces moyens de paiements afin de répondre à la demande croissante qu’entrainera cette obligation. Parallèlement, plusieurs acteurs nationaux, notamment des prestataires de service et de statup qui accompagnent la place bancaire, auront le temps de mettre en place les mécanismes nécessaires à un déploiement massif (disponibilité des produits) et un pilotage (SAV) de l’activité à l’échelle nationale.
Le déploiement des DAB et des TPE connait une certaine stagnation, voire un recul ces derniers mois, quels sont les facteurs ayant été à l’origine de cette situation ?
L’origine des retards reste, en grande partie, les conséquences de la situation provoquée par la pandémie. Toutefois, dès que la situation l’a permis, les dispositions ont été prises pour relancer les déploiements nécessaires. Plusieurs institutions financières ont lancé leurs commandes pour s’équiper et ont inscrit à leur programme le déploiement de nouveaux équipements.
Satim, quant à elle, accompagne ces institutions dans l’intégration des nouveaux équipements et leur déploiement tout en veillant au respect des normes et des procédures édictées par l’organe de régulation de la monétique.
Il était question de lancer de nouvelles cartes de paiement dotées de nouvelles spécifications ainsi que le paiement sans contact, qu’en est-il de la mise en service de ces deux produits ?
Effectivement, le projet a vu sa concrétisation par le lancement d’un pilote au cours de ces derniers mois qui a été jugé concluant. La généralisation de ce projet, se fera dès réception des nouvelles cartes en cours de commande actuellement d’une part et le déploiement de TPE Contact/sans contact prévus pour les mois à venir.
Il était question également d’élargir certains services et produits intra-bancaires à l’interbancarité, ce projet a-t-il avancé ?
Tout à fait, après l’interopérabilité des transactions de paiement, de retrait et de e-paiement), nous venons de lancer la consultation de solde sur DAB en interbancaire permettant ainsi à l’ensemble des porteurs de Cartes CIB et EDAHABIA de pouvoir consulter le solde disponible sur sa carte sur tous les DAB/GAB des banques et d’Algérie Poste.
Depuis le 08 Septembre, date d’ouverture du service, nous avons pu constater un véritable engouement des porteurs de cartes pour cette opération.
Ceci sera suivi par de nouvelles fonctionnalités sur DAB/GAB dans les prochaines semaines dans le but de faciliter au porteur l’accès à des services de paiement par carte (recharge téléphonique, paiement de factures, ..).
Par ailleurs, des projets de paiement, adossé un compte bancaire) via le téléphone mobile ont été lancés en intra-bancaire et sont en cours d’examen par le régulateur pour autoriser leur lancement en interbancarité.
Selon les responsables de la Banque d’Algérie, la réforme de la loi sur la monnaie et le crédit devrait apporter de nouvelles mesures de nature à encourager le paiement électronique. Selon vous, dans quel sens devrait évoluer cette réglementation pour permettre au paiement électronique de se développer davantage ?
Des projets sont en cours d’étude et devraient permettre une plus grande pénétration de l’utilisation des moyens de paiement électronique, pour ne citer que quelques exemples, le lancement du mobile paiement adossé à un compte bancaire et à un QR-Code dynamique, l’intégration de Marketplaces dans le e-paiement, le développement des FINTECH, l’émergence de Paiement Service Providers (PSP) devraient apporter une disponibilité plus grande des services de paiement digitaux. D’autre part, l’autorisation de paiement différé en fin de mois sur les cartes bancaires pourrait inciter les clients des banques à utiliser davantage la carte, bien entendu, sous réserve de mettre en place les mécanismes de contrôle des limites.
Ne pensez-vous pas que la faible bancarisation de la société freine le développement des moyens de paiement modernes ?
En comptant les banques et Algérie Poste, le nombre de comptes bancaires/postaux avoisine les 20 millions. En terme d’émission de cartes, cela présente un potentiel très appréciable pour le développement des moyens de paiement. L’urgence est d’équiper les clients existant des banques de ces moyens de paiement (Cartes pour les particuliers et les corporate) et Terminal d’acceptation (TPE, Mobile, Epaiement, etc…) puis de les convaincre de les utiliser le plus fréquemment possible en mettant à leur disposition des moyens de consultations et d’information disponible H24.
C’est ce que s’attèle à faire actuellement la communauté bancaire et ses prestataires malgré les contraintes rencontrées.
H. N. A.