Une première cette année lors de la célébration de Yennayer, le nouvel an amazigh avec la tenue près d’une semaine durant, du souk de Yennayer en plein cœur de la capitale qui s’est mise aux couleurs chatoyante de cette fête ancestrale.
Reportage réalisé par Karima Mokrani
Sur l’initiative de l’assemblée populaire communale d’Alger Centre et en étroite collaboration avec le mouvement associait local, un souk de Yennayer s’est tenue une samane durant. Ainsi, le centre commercial sis au sous-sol de l’esplanade jouxtant la Grande Poste, n’a pas désempli tant ils étaient nombreux, très nombreux même à le prendre d’assaut pour se plonger l’espace d’une virée dans l’ambiance familiale d’antan.
Et il faut admettre que ce souk a mis en valeur d’une manière indéniable la richesse et la diversité de notre patrimoine national, qu’il soit culinaire, vestimentaire ou autres. Art culinaire, produits du terroir, habits et tenues traditionnels, ustensiles et outils d’usage quotidien, dinanderie, bijoux, tout était mis en valeur par des exposants venus d’une quarantaine de wilayas du pays et qui ont su mettre en valeur cette richesse. Et le visiteur est vite mis dans l’air festif qui se fait sentir de l’esplanade de la Grande Poste, où les organisateurs ont veillé à donner au décor planté un cachet authentique reflétant la nature de l’évènement.
En effet, les files d’attente des visiteurs dévalant les escaliers du centre commercial fraichement rénové sont visibles de loin. Des visiteurs attirés par les couleurs chatoyantes des différents stands, mettant en valeur les us et traditions liés à la vie quotidienne. Des scènes qui étalent la relation étroite entre l’homme et la terre et son environnement de manière générale. «Notre participation à cette exposition vise à faire découvrir encore les traditions de la région de Kabylie. Ici, nous préparons la galette, nous roulons le couscous, et le visiteur peut voir comment les choses se font et avec quels ustensiles», soutient d’emblée Dahbia Mecefah, présidente de l’association culturelle «Tanekra» venue d’Agouni Fourrou, un vaste et populeux village des Ouacifs en haute Kabylie. Une association qui a mis au point tout un stand où on peut apprécier de près de vieilles femmes en train de tricoter Tisfifin, ces ceintures féminines aux couleurs chatoyantes et ce, tout en papotant et en discutant, manière de joindre l’utile à l’agréable. «Les femmes kabyles ne chôment jamais, elles sont toujours occupées à faire quelque chose… Peu importe l’activité», commente notre interlocutrice très sollicitée elle-même et ses accompagnatrices notamment par les femmes qui pour lui montrer comment rouler du couscous et qui d’autre comment préparer un métier à tisser. Dans le même stand, Farid vend des produits du terroir qu’il fabrique lui-même. «Ce sont des variétés de couscous préparées à base d’orge et de gland. Des figues sèches imbibées dans l’huile d’olive», explique-t-il.
Autre stand, autre facette de notre riche et patrimoine diversifié, celui dédié à la poterie présente en force à cette exposition.
«Ce sont des petites assiettes creuses confectionnées avec des matériaux 100% naturel. Depuis que nous avons délaissé les traditions ancestrales et nos habitudes alimentaires, beaucoup de maladies sont apparues. D’où la nécessite de renouer avec nos anciennes traditions et habitudes», estime l’exposant.
Hadja Fatma Kaâbache, présidente de l’association Souhoub pour la renaissance de l’artisanat local venue da la wilaya de Laghouat, expose, quant à elle, des tapis qu’elle tisse de ses propres doigts. «Nous exposons des tapis traditionnels berbères de plusieurs régions que je tisse moi-même, tels que les tapis de Laghouat, Ghardaïa et Khenchela», dit celle qui a une autre vocation, la vannerie. Un don qu’elle a étalé avec la panoplie d’objets fabriqués à base d’alfa qui témoignent de son savoir-faire et de la délicatesse du métier.
Pour Dalila Hamis, la présidente de l’association féminine «Houaa» d’Alger, coorganisatrice de l’événement, le but de cet évènement est la sauvegarde de notre patrimoine. «Trois wilayas sont présentes avec nous. La wilaya de Bouira a participé par l’exposition de poteries qui montre ce que nos grands-parents utilisaient dans les anciennes maisons, mais aussi un modèle du premier berceau kabyle et une charrue. D’autres exposants de la région d’Ath Ouacif, de la wilaya de Tizi Ouzou, représentent un tableau vivant montrant les activités des femmes kabyles comme celle qui transforme la laine du mouton, jusqu’à devenir prête pour le tissage. Celle-ci est dans de belles couleurs dont le jaune qui symbolise le sable doré du Sahara, le vert des montagnes et le bleu de la mer. Toutes ces couleurs sont également présentes dans les tapis berbères.
La wilaya d’El Bayadh na pas été en reste à travers la région de Bousemghoun qui propose de la poésie et des chansons amazighes» fait savoir Dalila Hamis. «Cette année pour Yennayer, on a fait une projection sur nos traditions amazighes et nous ne voulons pas que cette habitude disparaisse.» De son côté, Fatiha Ouadfel, exposante de la wilaya de Tlemcen soutient que la participation à cet évènement permet de montrer que nos coutumes et traditions «ne diffèrent pas beaucoup du reste des autres wilayas». «Elles sont toutes cohérentes et similaires les unes aux autres. Nous représentons la région de Béni Snous où le Ayred (le nouvel an amazigh) signifie lion, par rapport à son courage et à sa force. Et d’énumérer les activités qui caractérisent la célébration de cet événement, entre plats traditionnels, comme le couscous en sauce rouge avec sept légumes ou sept légumineuses, preuve de ce que produit la terre, le ‘’trid au poulet’’ ainsi que le carnaval d’Ayred, un spectacle semi-théâtral qui se déroule dans les allées et les ruelles et où les gens se déguisent, marchent et récitent des chansons populaires.
Pour Mme Ouadfel tout comme pour Mme Hamis, l’objectif principal de cette exposition est de préserver le patrimoine culturel de notre pays et les traditions de nos ancêtres.
Outre l’exposition, cet espace a également constitué pour l’artisane une opportunité pour commercialiser ses produits cosmétiques faits à base de plantes médicinales. Des produits qui attirent des clientes adeptes de «tout ce qui est naturel». Pas loin de là, un autre stand est dédié à la vente de meubles fabriqués en bois avec des cadres décoratifs, des miroirs, des chaises, des transats, des portemanteaux et des poufs…
Ce Souk de Yennayer à Alger a été organisé à l’occasion de Yennayer le nouvel an amazigh 2974, pour «célébrer le patrimoine et l’artisanat algériens dans toutes leurs richesses», selon le secrétaire général du HCA. Pour Si El Hachemi Assad, «il s’agit aussi de faire du marketing culturel. Les ambassadeurs accrédités à Alger étaient invités à visiter ce souk. Cinq startups y étaient présentes pour la première fois. Il s’agit de mettre en valeur notre patrimoine », a-t-il dit.
« Le souk Yennayer a rassemblé l’authentique et le moderne. Il s’agit d’évacuer les célébrations folkloriques de Yennayer », a noté le premier responsable du HCA.
K. M.