Lapalissade ? Climatologie quasi idéale, vastitude des sols arables mais un know how loin de la coupe aux lèves, l’Algérie souffre de paradoxes avérés quand des produits stratégiques alimentaires pèchent par une production encore en deçà des attentes et ombrage les pourtours de la sécurité alimentaire du pays. C’est ce à quoi s’est évertué à démontrer, mardi 28 février, le président de la République, dans son allocution dans un ton aigre- doux, à l’ouverture des assises nationales de l’Agriculture, tenues au Palais des nations et auxquelles ont pris part de hauts responsables de l’Etat, des membres du gouvernement ainsi que des représentants du secteur agricole.
En substance, Abdelmadjid Tebboune a donné la nette impression de vouloir sonner le réveil d’un monstre en dormance. Entre satisfecit et attentes cruciales, le Président a lancé son mot d’ordre : place «aux investissements scientifiques et étudiés» !
Par Azouz Kafi
Le chef de l’Etat a commencé d’abord par un énoncé suivant la vision du verre à moitié plein, pointant des résultats positifs enregistrés par le secteur durant ces dernières années pour les décliner à hauteur de 14,7% dans le PIB (Produit intérieur brut en 2022 pour une valeur de production de près de 4550 milliards de DA, soit une hausse de 38 % par rapport à 2021. Sur ce plan, il ne manquera pas, d’ailleurs, de s’en féliciter.
Il passera ensuite à la phase des constats critiques, après avoir affirmé que la sécurité alimentaire étant devenue une soupape de sécurité que les gouvernements, notamment des pays les plus nantis, placent en tête des priorités et au cœur de leur stratégie, l’Algérie mise désormais sur le secteur agricole pour se libérer de la dépendance aux recettes des hydrocarbures.
Sur ce volet, Tebboune allait brocarder des chiffres erronés prévalant dans les statistiques du secteur.
«Pendant longtemps, des dizaines d’années, on a avancé des chiffres sur la production agricole. Après révision, on se rend compte qu’on est loin de la réalité. Par exemple, on a toujours parlé de 3 millions d’hectares de surface agricole. Or, après vérification, le vrai chiffre est de 1,8 millions d’hectares. Idem pour l’élevage. On a avancé le chiffre de 29 millions de têtes. Le vrai chiffre est 19 millions de têtes», a- t- il ainsi indiqué, le ton navré et jugeant que «Lorsque les chiffres sont faux, l’analyse est fausse», ajoutera- t- il. Partant, le Président allait axer sur la nécessité de recourir à la numérisation pour accéder avec exactitude aux chiffres réels relatifs au secteur.
Plus particulièrement, le Président a focalisé sur la filière céréalière qu’il voit comme le socle de la sécurité alimentaire au vu des perturbations et de la pénurie en Europe dans le sillage de la guerre russo- ukrainienne.
Il s’y attendra assez longuement pour dire, entre autre, que si le taux de couverture des besoins alimentaires par la production nationale a atteint 75 % et assurer l’emploi à plus de 2,7 millions de travailleurs, le secteur reste à même de produire un minimum de 60 quintaux/hectare en moyenne, pour peu que soient exploitées toutes ses potentialités, «notamment dans le sud», fera- t- il observer. Une perspective qui lui permet d’affirmer que l’exploitation de toutes les potentialités et de tous les atouts pour augmenter la production, permettrait au pays de se tourner vers l’exportation des céréales.
Un objectif qui suppose une modernisation optimale de l’outil de production mais également un changement de fond des mentalités. «Prenez des initiatives, fixez des objectifs ambitieux et fiables et l’Etat sera à vos côtés pour vous accompagner» réaffirmera, dans ce contexte, le Président à l’adresse des agriculteurs.
Dans cet ordre d’idées, il a insisté sur la nécessité de trouver «une solution définitive» a-t-il instruit, pour le problème du foncier agricole à l’effet de libérer l’agriculteur de toute contrainte susceptible d’entraver sa bonne marche vers la diversification de la production dans les différentes filières agricoles, tant recherchée pour faire accroître les revenus du secteur et, subséquemment, les réserves du pays. Cela suppose également une plus grande mobilisation du monde agricole, en incluant les jeunes qu’il a incité à s’y s’orienter dans le cadre des startups, afin d’assurer la sécurité alimentaire du pays. Dans ce contexte, Abdelmadjid Tebboune conclura par un mot d’ordre, à l’allure de défi : «Je pense que nous ne sommes pas très loin d’atteindre notre indépendance alimentaire.
Quelques étapes encore à franchir et nous y parviendrons sûrement et sans contrainte», avant d’ajouter, résolu : «Nous accéderons à l’autosuffisance d’ici 2024-2025», a promis le président de la République.
A. K.