Ayant plus de 20 ans à la direction de l’urbanisme et des équipements service de l’urbanisme de l’APC d’Alger-Centre, Rachid Ighebriouen fait le point, dans cet entretien, sur l’opération de réhabilitation des immeubles dans sa commune, mettant le focus sur le nombre de bâtisses réhabilitées, la durée de l’opération, le choix des immeubles à réhabiliter et des entreprises réalisatrices, les difficultés rencontrées…etc.
entretien réalisé par Larbi Tazrout
Quand est-ce que l’opération de la réhabilitation a été engagée ?
La première opération de réhabilitation des immeubles a été engagée en 2009. Timidement. Et fin 2012 à début 2013, la wilaya d’Alger avait injecté beaucoup d’argent pour relancer l’opération sur l’ensemble des grands boulevards d’Alger-Centre (Amirouche, Larbi Benm’hidi, Didouche Mourad, Mohamed VI, Hassiba Ben Bouali, Krim Belkacem, etc). Ils ont engagé les travaux dans ces boulevards d’une manièresimultanée.
Combien de bâtisses avez-vous restauré jusqu’à ce jour ?
On a 283 à 300 immeubles restaurés à Alger-Centre sur 3000 immeubles qui sont concernés par cette opération. Ils sont tous concernés par la réhabilitation mais échelonnés dans le temps. Ce n’est pas dans un quinquennat qu’on ira au bout de cette opération. Le plan stratégique de la wilaya d’Alger 2009-2029 est échelonné et on injecte de l’argent dans chaque quinquennat. On investit 100 milliards de centimes par an.
Pendant le présent mandat de M.Bettache combien de bâtisses comptez-vous restaurer ?
Je n’ai pas le nombre global, c’est en fonction des crédits alloués par l’Assemblée.
Comment se fait le choix des bâtisses à réhabiliter ? Par expertise ?
Pour les anciens immeubles, vous n’avez pas besoin de faire une expertise. Ce sont des immeubles qui ont plus de 150 ans d’âge, il suffit de voir à l’œil nu. Tout est clair. Pour les opérations engagées par la wilaya, elles concernent les grands boulevards. La commune s’occupe des perpendiculaires et des quartiers à l’intérieur. Récemment on a recensé le quartier populaire Debbih Cherif, Soustara, etc. L’année prochaine on passera à d’autres rues ( Mulhouse, Yahia Benaiche, etc).
Avez-vous bon espoir que d’ici 2029, l’opération sera menée à terme ?
Ce n’est pas une mince affaire. Il faut beaucoup d’argent et un grand nombre d’entreprises spécialisées alors que nous n’en avons pas assez. En outre, les entreprises n’ont pas de stabilité dans la main d’œuvre.
Les entreprises sont-elles algériennes ?
Oui ce sont des entreprises nationales. Au début, ils ont engagé des entreprises espagnoles et turques avant de changer de stratégie. Des entreprises algériennes ont pris le relais. Aujourd’hui, on a une centaine d’entreprises engagées dans cette opération. Avant on confiait un ensemble de bâtisses à réhabiliter à une seule entreprise. Toutefois, ces entreprises n’avaient pas les moyens humains et financiers pour exécuter un tel plan de change dans les normes et les délais. Souvent, il y a des retards dans la réalisation des travaux. D’où l’impératif de changer de méthode. Actuellement, on confie les travaux de 2 à 5 immeubles au maximum pour une entreprise. L’opération est scindée en plusieurs lots séparés et les cadence des travaux avance très bien.
Et comment se fait le choix des entreprises ?
Le choix des entreprises c’est du ressort de la wilaya d’Alger et non pas de la commune.
Les travaux de restauration à l’intérieur des immeubles, les cages d’escaliers notamment, n’est-il pas prévu dans cette opération ?
Ce travail est en train de se faire.Il est vrai qu’au début les autorités n’ont pas mis en place un dispositif qui va gérer tout ce que vous venez d’énumérer. Actuellement, ils sont en train de travailler avec les comités de quartiers. L’Etat prend en charge la façade, la cage d’escalier, l’étanchéité et les paraboles.
Pour le reste, c’est à dire la gestion, c’est le Syndic qui s’en charge. Il y a un décret dans ce sens. Ce sont les copropriétaires qui doivent gérer et installer le Syndic et non pas l’Etat. Au niveau de la commune, ils ont mis en place un dispositif et il y a un élu qui est chargé de recevoir les comités de quartiers pour les sensibiliser sur la nécessité d’installer un Syndic au niveau de chaque immeuble.
Nous, nous injectons de l’argent et donnons des subventions à la wilaya qui, par la suite, gère l’opération. Mais ce système requiert la disponibilité des crédits.
Et aujourd’hui, l’argent est-il justement disponible ?
Oui, pour les immeubles retenus, l’argent est disponible. On donne des projets à des entreprises en fonction de crédits mis en place pour ne pas tomber dans le problème des impayés.
Vous avez dit que vous allez procéder à des travaux d’étanchéité au niveau des immeubles. Qu’allez-vous faire des familles occupant des terrasses ?
A chaque fois qu’il y a un immeuble qui est concerné par les travaux d’étanchéité et que la terrasse est occupée, il y a un relogement systématique. Donc les personnes occupant les terrasses et les caves, sont relogées. Pour votre information, il y a 400 familles, dans ces deux cas précis, qui sont relogées dans la commune d’Alger-Centre.
Pour ce qui est des immeubles recensés et concernés par la réhabilitation, certains sont-ils dans la zone rouge?
Il y a beaucoup d’immeubles qu’on appelle immeubles menaçant ruine (IMR) et qui sont classés rouge, c’est-à-dire à démolir. Mais ce n’est pas facile de démolir un immeuble à Alger-Centre car c’est des ilots qui sont solidaires. Si on démolit un immeuble, les autres vont, dans 05 à 10 ans, se fragiliser. Donc ces dernières années, nous avons optés pour leur rénovation-réhabilitation pour ne pas défigurer les sites. Aujourd’hui on a une juste dizaine d’immeubles classés rouge mais auparavant on en avait 80 environ. Certains on les a réhabilités et d’autres, non solidaires, on les a démolis.
Des citoyens, parfois, engagent des travaux dans leurs appartements, sans l’avis des services techniques. C’est le cas de «La Parisienne» qui a vu le propriétaire de la boulangerie-pâtisserie démolir un mur porteur qui a fragilisé tout l’immeuble. Que font vos services pour éviter ou prévenir ce genre d’incidents?
A chaque fois que quelqu’un engage des travaux ses voisins le dénoncent. Quand il y a des plaintes on intervient avec la force publique (la police) et on arrête les travaux. Et quand des personnes touchent aux murs porteurs, on dépose plainte devant le procureur. On a pratiquement un cas par mois.
Qu’en est-il du choix des couleurs des immeubles?
Pour les murs, c’est la peinture blanche. Pour la ferronnerie des balcons, c’est le noir.
Quant à la boiserie, c’est le gris. En tout cas, à notre niveau, nous essayons de garder les couleurs d’origine, c’est pour cela qu’il y a certains immeubles qui sont repeint avec d’autres couleurs que la couleur blanche.
L. T.