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Ali Bey Nasri, président de l’Association nationale des exportateurs algériens : « L’exportation a besoin de grands acteurs »

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Impliquée directement dans la promotion des exportations hors hydrocarbures, l’ANEXAL se veut aujourd’hui une force de proposition à la disposition des pouvoirs publics pour apporter sa contribution au développement de l’activité export des opérateurs économiques algériens. Son président, Ali Bey Nasri, insiste, à cet effet, sur la nécessité d’encourager l’émergence de grands acteurs producteurs de biens industriels et agricoles, maitrisant les rouages de l’exportation et disposant des moyens techniques et financiers à même de s’imposer sur les marchés internationaux. Selon lui, le recours à l’expertise étrangère en la matière et l’investissement direct étranger demeurent une condition sine qua non, notamment en ce qui concerne la filière agricole qui commence à connaitre bon essor.

entretien réalisé par Lynda Mellak

Les pouvoirs publics se sont grandement intéressés, ces dernières années, à la promotion des exportations hors hydrocarbures pour tirer le pays de sa dépendance aux recettes générées par le pétrole. Bien qu’il y ait eu de grandes percées dans ce domaine, les exportations hors hydrocarbures ont connu, ces derniers mois, un recul par rapport aux deux années précédentes. Quel constat en faites-vous ?
Pour établir un état des lieux des exportations hors hydrocarbures en Algérie, il faut d’abord distinguer deux approches. Il y a l’approches qui concerne l’effort consenti par l’Etat en matière de mise en place des mesures visant la promotion des exportations hors hydrocarbures, et celle qui concerne l’opérationnel avec son lot de chiffres et de statistiques. Lorsque nous examinons la structure globale des exportations hors hydrocarbures, nous constatons que les produits de Sonatrach, des dérivés directs du pétrole, ainsi que les fertilisants (ammonitrate, urée et ammoniac) y figurent et pèsent lourdement dans la balance. De ce fait, toute fluctuation dans les prix du pétrole impacte l’ensemble de ces exportations. C’est la raison pour laquelle, avec la chute du prix du baril de pétrole, les importations hors hydrocarbures ont enregistré, durant le 1er semestre 2019, un recul de 10%. La meilleure façon, donc, d’analyser les exportations hors hydrocarbures, c’est de les examiner par filière.

Que reflète justement l’analyse par filière des exportations ?
L’analyse montre que la filière agricole est une filière qui commence à émerger. Les dattes représentent 90% des produits exportés. La filière est parvenue à réaliser, en volume, une croissance de 150%, durant les quatre dernières années, avec des exportations ayant atteint, l’année dernière, 50 000 tonnes. L’Algérie commence donc à émerger en tant qu’acteur dans cette filière. Il faudrait seulement que nous parvenions à valoriser notre datte, pour la vendre au prix moyen de la tonne qui est de 2,5 milliards de dollars. Il faut savoir aussi que nous avons beaucoup de produits agricoles sur le marché international, mais en très petites quantités, tels que les abricots, les pommes, le melon, la pastèque, le cantaloup et autres. Cela présente pour l’instant un handicap à l’exportation à grande échelle, d’autant que la filière n’est pas prise en charge par de grands acteurs. En Tunisie par exemple, un seul opérateur exporte, à lui seul, pas moins de 12 000 tonnes de dattes. Au Maroc, trois exportateurs de fruits et légumes exportent, à eux seuls, l’équivalent de 2 à 3 milliards de dollars. C’est dire que l’exportation nécessite une taille critique. Pour que les produits algériens puissent s’imposer sur ce marché, il faudrait que les opérateurs aient les moyens financiers, planifient leurs opérations en fonction de la demande internationale et s’inscrivent en « hors saison ». Il faudrait aussi ne pas se contenter du marché des pays du Golfe et s’orienter notamment vers le marché européen, étant le mieux rémunérateur, d’autant que nous pouvons utiliser le transport maritime qui coûte moins cher que le transport aérien.

Que préconisez-vous pour développer l’exportation des produits agricoles ?
Je suis de ceux qui pensent que le développement des exportations des produits agricoles passe nécessairement par les IDE. Nous ne maitrisons pas encore la conduite du protocole technique en la matière, nous ne disposons pas la bonne qualité de semence et nous avons un déficit en matière de traitement phytosanitaire. Il faudrait aussi maitriser la chaîne logistique du froid, avoir un accès rapide au réseau du marché européen des fruits et légumes, qui représente le plus grand marché de l’Europe et, enfin, assurer une certaine régularité des volumes à exporter. Les opérateurs marocains et tunisiens ont su réunir ces conditions avec l’aide des investisseurs étrangers.

Qu’en est-il des produits agroalimentaires ?
L’exportation de ces produits concerne essentiellement les pâtes, les biscuits, les jus et bien entendu le sucre, avec pas moins de 220 millions de dollars. Le pays jouit d’atouts considérables pour devenir un grand exportateur de pâtes, pour peu que le problème des subventions soit réglé. Nous exportons aussi beaucoup de boissons, de biscuits et de produits laitiers, notamment vers la Tunisie, la Libye et autres pays d’Afrique comme le Sénégal, la Côte d’Ivoire et le Bénin.

Il y a un autre secteur, celui de l’électroménager, qui commence à s’imposer sur le marché africain. Avez-vous constaté cela à travers les volumes exportés ?
Effectivement, c’est une filière qui a connu un développement très puissant, puisqu’elle n’existait pas, à l’export, il y a 4 ans de cela. Aujourd’hui, nous avons des acteurs qui ont une taille importante et qui arrivent à accéder aux marchés étrangers, à l’exemple de Condor, Iris, Brandt et Bomare Company. C’est une filière qui fait près de 60 millions de dollars d’exportation et promet d’aller encore plus loin, d’autant que les entreprises qui la représentent n’ont pas vraiment de concurrents au niveau maghrébin et africain. Notons aussi qu’il y a d’autres produits industriels qui sont exportés, comme le verre de Cevital avec une valeur assez appréciable de 35 millions de dollars, ainsi que les gaz rares et l’hélium.

L’Algérie vient d’officialiser son adhésion à l’accord sur la Zone de libre échange commercial africaine. Pensez-vous de cet accord ?
Il faut rappeler à ce propos que nos frontières avec certains pays africains sont toujours fermées, notamment avec le Niger, un pays qui représente un passage obligatoire pour exporter vers l’Afrique. A travers ce pays, nos exportateurs peuvent accéder au Mali, au Burkina-Faso, au Nigeria et au Tchad. Il y a aussi le problème de la réglementation relative au change qui ne permet pas, pour le moment, aux investisseurs nationaux d’aller vers ces pays. Je tiens ici à relever la nécessité, pour nos opérateurs, de participer aux foires économiques africaines qui demeure l’une des conditions à même d’accéder aux marchés et connaitre les rouages de l’exportation.
L. M.

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