Le programme national d’accompagnement des start-up, Algeria Startup Challenge, ambitionne de permettre à des centaines de jeunes porteurs de projets de concrétiser leur rêve en leur permettant d’avoir les compétences essentielles et le suivi adéquat au lancement de leurs start-up, partant, de bénéficier des financements nécessaires pour la réalisation de leurs solutions innovantes. Abdelfettah Herizi, directeur du programme Algeria Startup Challenge, nous parle dans cet entretien qui suit des tenants et aboutissants de ce programme, ainsi des objectifs qui lui ont été assignés.
Propos recueillis par Hacène Nait Amara
Pouvez-vous nous présenter le programme de Algeria Startup Challenge ?
Algeria Startup Challenge est un programme national d’accompagnement des startup, fondé en 2018 et parrainé dans sa deuxième édition cette année par le ministre délégué de l’Economie de la Connaissance et des Startup. Son objectif est de permettre à un grand nombre de porteurs de projets de concrétiser leurs solutions. Cette année, nous avons organisé cinq sessions préliminaires, à Alger, Constantine, Oran, Bechar et Ouargla dans le but de permettre aux jeunes Algériens des quatre coins du pays d’avoir la chance de faire partie du programme. Les thématiques de ces sessions concernaient le e-commerce & Fintech, la télémédecine, la distribution logistique, le tourisme, E- gouvernance et l’économie circulaire. Il faut noter que la communauté de Algeria Startup Challenge compte actuellement plus de 5000 membres répartis sur le territoire national tout en ayant dans son réseau un grand nombre de la diaspora Algérienne.
Comment s’est fait le choix des thématiques ?
Le choix des thématiques s’est fait en se référant aux domaines économiques stratégiques en Algérie et aux secteurs à relancer notamment le commerce électronique, l’économie circulaire et le tourisme. Nous avons rajouté, par la suite, le thème de la télémédecine en raison de la situation sanitaire de pandémie liée à la COVID-19.
Expliquez-nous comment se déroule le processus de sélection des projets ?
Nous avons installé un comité scientifique chargé d’évaluer toutes les solutions qu’on reçoit (elles sont au nombre de 650 cette année) et de choisir les start-up devant présenter leurs bisness model. Les meilleurs projets sont par la suite choisis et accompagnés pour les préparer à la grande finale. Cet accompagnement est réalisé dans le cadre d’un programme d’accélération tenu au mois de Ramadhan dernier visant à préparer les 50 start-up finalistes sélectionnées lors des sessions préliminaires à confronter des investisseurs particuliers et même le Fonds d’investissement étatique pour avoir d’abord le label de start-up et décrocher, ensuite, un financement auprès des investisseurs. La grande finale va aussi regrouper des incubateurs et des accélérateurs et les partenaires d’Algeria Start-up Challenge dont le programme des Nations-Unies pour le développement en Algérie avec qui nous avons lancé le Corona-Hackathon en réponse à la situation de pandémie liée à la Covid-19. Il y a eu, à ce propos, des solutions concernant la mise en relation médecin/patient à travers la consultation à distance, entre des enseignants et leurs étudiants, des solutions de distribution de gel hydro alcoolique et autres que nous avons accompagné dans leur lancement ces trois derniers mois.
Avez-vous sollicité l’aide de la diaspora algérienne pour la réalisation de votre programme ?
Nous avons fait appel à des membres de la diaspora algérienne pour faire des séances de coaching avec les porteurs de projets. Nous les avons sollicités car ils ont une grande expérience dans ce domaine, certains d’entre-eux ont réussi à lancer plusieurs start-up dans des marchés très compétitifs à l’étranger. Notre objectif et de parvenir, avec leur soutien à internationaliser nos start-up et exporter leur savoir-faire.
Concrètement, en quoi consiste l’accompagnement d’un porteur de projet ?
Il s’agit, dans le cadre du programme Algeria start-up challenge, de séances de coaching sur les thématiques dont le porteur de projet a besoin, de l’établissement d’un bisness model, de l’élaboration d’une stratégie de lancement et du plan marketing et de la préparation à la confrontation avec les investisseurs, mais aussi le networking dont le porteur de projet a besoin pour la mise en marché de sa solution, le tout pour offrir une meilleure orientation et accompagnement aux jeunes innovateurs.
Peut-on connaitre le nombre de start-up accompagnées jusqu’ici ?
Nous avons coaché jusqu’ici pas moins de 1500 projets de start-up, avec un pourcentage de 5 à 7% de réussite et de concrétisation. Le taux de mortalité et donc très élevé en raison de l’absence, durant les premières années, de beaucoup de facteurs macroéconomiques. On peut citer entre autres, l’absence du e-paiement, du registre de commerce pour les start-up et un fonds spécial dédié aux start-up. Mais il faut dire qu’on est dans la norme, puisque le taux de réussite des start-up, dans le monde, tourne autour d’une moyenne de 5%.
Quel type de financement ces start-up ont-elles besoin ?
En fait, il y a trois types de startuppeurs selon le stade d’avancement de leur projet. Tout d’abord, ceux qui viennent avec des idées et un bisness model tout prêt et ont besoin d’un fonds d’amorçage pour concrétiser l’idée. Deuxièmement ceux qui présentent un prototype ou une solution prête à être lancée, là on est sur un budget de marketing, soit environ 2 millions de dinars en moyenne pour gérer le lancement du projet, voire recruter du personnel.
Et enfin, les startups établies qui cherchent la scalabilité. Il faut savoir qu’il s’agit dans tous ces cas là d’un financement risqué, raison pour laquelle les start-up font appel généralement aux business angels, fonds d’amorçage au début, et aux capital-risqueur ensuite pour lever des fonds permettant de rendre scalable leurs start-up
Trouvent-elles ces financements facilement ?
Dans le passé, on mettait ces start-up en relation avec les investisseurs potentiellement intéressés par les solutions proposées. Parfois, on oriente le projet vers un financement Ansej, ce qui n’était pas efficace étant donné que le financement de ce genre d’entreprises innovantes est très difficile à décrocher vu le risque qu’il comporte. C’est la raison pour laquelle le financement le mieux adapté à ce type de start-up est le capital risque.
Comment voyez-vous aujourd’hui la volonté affichée par l’Etat quant à la promotion des start-up ?
La création d’un ministère dédié aux start-up a fortement contribué à mettre en place le cadre juridique nécessaire à ce type d’entreprises. Nous sommes d’ailleurs soutenus par ce ministère avec lequel nous faisons périodiquement le point de la situation et des start-up y sont régulièrement reçues pour exposer leurs problèmes et essayer de trouver des solutions. L’Algérie a vraiment réalisé un grand pas dans la prise en charge des start-up, notamment en matière de financement.
Y a-t-il une quelconque collaboration entre les différents incubateurs chargés d’assurer l’accompagnement des porteurs de projet ?
Nous avons initié avec tous les acteurs de l’écosystème un réseau algérien des incubateurs et acteurs de l’innovation qui fédère toutes les structures actives dans l’accompagnement des start-up. L’objectif de ce réseau est de se constituer comme une force de proposition au gouvernement. Mais il faut dire qu’il y a toujours un vide juridique par rapport à l’activité de ces incubateurs.
Le ministère en charge du secteur œuvre justement à aplanir les problèmes rencontrés par ces structures et mettre en place le cadre juridique adéquat.
H. N. A.