En participants aux travaux du 1er Congrès, que je remercie, j’ai vite répondu à participer par cette contribution sur les choix stratégiques d’une gouvernance en la matière.
Par Boudjemâa Haichour, Dr d’Etat en Sciences Economiques
En participants aux travaux du 1er Congrès, que je remercie, j’ai vite répondu à participer par cette contribution sur les choix stratégiques d’une gouvernance en la matière.
Evidemment le thème est vaste portant sur les énergies renouvelables, la sécurité énergétique et la sécurité alimentaire. Il s’agit pour moi de cerner la problématique et aborder les différents sujets qui reflètent le générique du Congrès.
L’Algérie en tant que pays pétrolier et gazier peut-elle dans une perspective moyenne couvrir ses besoins énergétiques ? Saura-t-elle assurer sa sécurité si le pic des hydrocarbures connaitrait le cap de 2025 pour le pétrole et 2045 pour le gaz selon des études de l’AIE ? Combien coûterait une transition énergétique pour un Algérien qui consomme de l’électricité si selon la même source il serait amené à payer 70% d’un SMIG ?
Dans une étude élaborée par le PNUD sur la base des données de l’AIE, notre pays figure parmi les pays qui subventionnent le plus les produits énergétiques (électricité, carburant soit 6,6% du PIB algérien durant la dernière décennie. En augmentant la consommation intérieure sans modifier les prix intérieurs, la durée de vie à l’horizon 2026 serait de 13ans. Il faut rappeler que 96% de l’électricité produite dans notre pays se fait à partir du gaz naturel.
C’est pourquoi qu’en matière d’ingénierie le Gouvernement est entrain d’axer sa stratégie en privilégiant un bouquet énergétique par le transfert de savoir-faire managérial et technologique avec un partenariat gagnant/gagnant en termes de co-développement.
Une transition énergétique équilibrée
Il faut donc envisager une efficacité énergétique par une nouvelle politique des prix réduisant le gaspillage des ressources. Investir en amont pour de nouvelles découvertes tout en valorisant la filière pétrochimie. Il faut doubler les capacités de raffinage avec la construction des six nouvelles raffineries qui couvriront les besoins au moins d’ici 2040. Le développement des énergies renouvelables avec des centrales électriques hybrides combinant 20% de gaz conventionnel et 80% de solaire.
Les filières concernées sont le solaire photovoltaïque, thermique, éolien, la petite hydraulique, la biomasse avec la mise en place d’un fonds national de maîtrise de l’énergie(FNME) pour assurer le financement de ces projets. Le programme prévoit d’ailleurs une centrale d’une puissance de 22000MW d’ici 2030 soit 27% du bouquet énergétique et 12000 MW pour couvrir la demande nationale d’électricité et 10 000 pour l’exportation.
Selon les estimations d’ici 2030 environ 40% de la production d’électricité destinée à la consommation nationale sera d’origine renouvelable. Ce programme de développement des énergies renouvelables serait compris entre 60 et 100 Milliards de dollars portant la capacité à 36 000 mégawatts.
Est-ce que notre pays pourrait construire une centrale nucléaire en 2025 pour faire face à la demande sans cesse accrue ? Est-ce que l’option gaz de schiste estimée par l’AIE de 6000 milliards de mètres cubes gazeux et entre 12000 et 17 000 milliards de mètres cubes selon le ministère de l’énergie si le consensus autour du risque pollution des nappes phréatiques serait accepté ?
Il y a une année en Avril 2017, un protocole d’entente de recherche et développement a été signé dans le domaine de l’efficacité énergétique et des énergies renouvelables entre le Groupe Sonatrach et l’entreprise française Engie.
Dans ce partenariat Sonatrach bénéficiera d’un programme de compétences et de l’expertise en matière de technologie solaire et d’efficacité énergétique des processus par la valorisation du gaz torché et des applications solaires innovantes pouvant être intégrés dans le processus d’exploitation et de production de gaz et de pétrole.
Lors de son intervention à la Conférence-Exposition sur la stratégie de transition énergétique à l’horizon 2030, le Ministre de l’Energie M Guitouni avait exprimé la différence d’approche entre notre pays et ceux de l’Europe de l’Ouest quant au concept de transition énergétique.
Il devait rappeler que notre pays dispose de réserves prouvées récupérables d’hydrocarbures de plus de 4000 Milliards de Tonnes équivalent pétrole (TEP) dont plus de la moitié en gaz naturel. Selon sa déclaration, notre pays produit en moyenne 150 millions de Tonnes équivalent pétrole dont 100 millions TEP sont exportés.
A ce potentiel vient s’ajouter en termes de réserves conventionnelles résultant du taux de récupération de gisement en exploitation qui représente une ressource importante à mobiliser et permet un scénario moyen de production permettant à l’Algérie de couvrir ses besoins d’ici 2030. Il est question d’une refonte de la loi sur les hydrocarbures.
Il reste que l’impératif de développer les ressources non-conventionnelles d’hydrocarbures gazeux se pose sur le long terme pour assurer notre sécurité énergétique à travers les modules solaires, turbines éoliennes et chaudières de la biomasse qui seront moins chères et aux prix stables à l’avenir selon l’AIE avec comme objectif la diminution des gaz à effet de serre, de réduction des effets sur l’eau, l’air et les sols en un mot tous les effets nocifs sur l’environnement.
Une sécurité énergétique dans une gouvernance maitrisée
Telle a été la problématique avancée par mon ami Dr Abderahmane Mebtoul quant à la sécurité énergétique d’une transition raisonnable qui reste tributaire d’une gouvernance maitrisée dans toute la rationalité économique face au défi énergétique mondial et les mutations qui s’opèrent dans le monde. Et si crise il y a elle ne peu émane de la mauvaise gouvernance.
Mais pour assurer la sécurité du pays, il faut penser à muter du concept des petro dollars à celui des agro-dollars. Pour cela il est plus que nécessaire de réduire notre dépendance agro alimentaire par une politique de développement durable et entamer notre révolution verte et la préservation de notre environnement et son équilibre écologique.
Le défi pour garantir notre sécurité alimentaire se pose avec acuité malgré les efforts déployés dans le cadre du PNDRA.
Les enjeux de demain c’est comment continuer à réduire notre dépendance agro alimentaire qui risque d’être structurelle par le volume des importations sur le marché céréalier mondial. Les industries agro alimentaires sont elles mêmes liées aux quantités de blé tendre et dur que les paquebots accostent chaque semaine à nos ports. C’est une préoccupation de taille qui nous interpelle dans notre autosuffisance et notre sécurité alimentaire.
Tout reste lier à notre gouvernance et au travail de la terre. Pour parer à la menace de l’arme alimentaire, notre pays doit concrétiser l’équilibre entre l’offre nationale et le recours au marché international des céréales en développant le secteur agricole par la mécanisation et l’irrigation des terres restées longtemps en jachère. Il faut intéresser les jeunes au travail de la terre face au vieillissement de la population travaillant la terre dans les hauts Plateaux, le Sud et même dans les plaines du littoral.
Car sur le plan nutritionnel on continue de dépendre de l’extérieur où 2sur 3 calories est importées (farine, lait, semoule, huile, etc…) Que faire d’ici l’an 2030 où la population avoisinera les 50 millions d’habitants ? Des questionnements et des interpellations tant pour les pouvoirs publics que pour les experts. Telle est la question posée pour garantir notre sécurité du demain proche.
Parallèlement à une économie numérique qui se fraie le chemin d’une croissance par des projets structurants, le moment est venu d’opérer à une refonte dans le domaine agraire en libérant les initiatives surtout en retrouvant l’Algérie qui fut « Grenier à blé de Rome » qui ne peut se faire que par l’effort qui est entrepris par le pays en mobilisant d’énormes capacités d’eau.
Pour une sécurité en ressources hydriques à l’horizon 2030
Le monde de demain sera celui qui saura développer ses ressources en eau tant pour l’agriculture que pour celui d’une autosuffisance en eau potable. Les grands défis à l’avenir à partir de l’horizon 2030 serait la maitrise de nos capacités hydriques surtout que notre pays a considérablement construit des barrages y compris ceux de la moyenne hydraulique.
En fait l’accès à l’eau est considéré comme un droit fondamental par l’ONU. Si on observe aujourd’hui notre planète, un milliard d’humain n’a pas accès à l’eau potable. Les ressources eau sur notre terre comportent 97,5% d’eau salée et seulement 2,5d’eau douce. En 2030 la pénurie d’eau concernera 40% de la population mondiale. Dans le monde plus de 30% d’eau potable est perdue. Ainsi pour produire un Kg de blé il faut environ 590 litres d’eau. Pour obtenir un Kg de viande il faut 13 000 à 15 000 litres d’eau.
Selon les mêmes estimations onusiennes à une population mondiale active de 3,2 Milliards personnes, 78% emplois dépendent de l’eau dans les huit secteurs d’emplois. Le changement climatique entraînera la perte de 2% des emplois d’ici 2020 et en revanche selon les mêmes études, l’investissement dans des infrastructures d’accès à l’eau peut générer 1,9 million d’emplois directs ou indirects pour un volume financier de 188 Milliards de dollars investis aux Etats unis.(https//www.acme-eau.org).
Dans notre pays l’immense programme d’investissement dans la construction « des barrages, des transferts, des stations de dessalement d’eau de mer a pleinement absorber le déficit de la ressource en eau induit par un développement exponentiel de l’urbanisation, des activités agricoles et industrielles et à termes anticiper la demande future pour garantir l’accès à l’eau potable et à l’assainissement ».
Si on doit évaluer comme le souligne le document de septembre 2015 du ministère en charge de l’eau, au plan environnemental , le programme ambitieux vise l’amélioration de la Gouvernance et la prise en charge effective des problèmes ayant un impact sur l’eau, l’air, les sols, la biodiversité et le littoral y compris les problèmes émergents tels ayant trait au climat, à la couche d’ozone, à la désertification et aux risques technologiques.
-Pour quantifier de 1999 à 2015 le volume des investissements consentis, les différents programmes s’élèvent à plus de 3415 Milliards de DA (soit plus de 43 Milliards de dollars USD).Ces importants programmes ont permis de générer des quantités d’eau en quantité et en qualité. Le Gouvernement a mis en profit cette ressource en eau pour préserver l’équilibre régional et la sécurisation à travers la réalisation de grands ouvrages de mobilisation, de transfert et d’interconnexion.
Le soutien à l’agriculture par la réalisation d’équipement, de réaménagement et de modernisation des périmètres irrigués soit 2,1million d’hectares irrigués pour soutenir notre stratégie de sécurité alimentaire dans le cadre de cette stratégie de l’eau instruite par le plan national de l’eau(PNE) sur la base des instructions de SE Monsieur le Président de la République Abdelaziz Bouteflika.
Valoriser les «agro dollars» et préserver nos pétrodollars
la mobilisation de la ressource de 1,2 Milliards de mètres m3 soit 16% de la capacité de 2015 qui est de 7,4 Milliards de m3 pour répondre à la demande d’eau potable et soutenir l’agriculture à travers la réalisation de 26 barrages totalisant 985 millions de m3, dévasement de 10 barrages d’une capacité globale de 45 millions de m3 et la réalisation et l’équipement de 680 forages d’un linéaire de 180 mille mètres linéaires pour une mobilisation de 172 millions de m3/an.
Pour ce qui est de l’AEP le programme a soutenu la réalisation de 2240 km par an de canalisations et de 17 stations de traitement avec 136 réservoirs ainsi que la réabilitation de 1680 km/an de conduites destinées à l’amélioration du service public de l’eau en éradiquant la fréquence de distribution de 1j/2 et plus en augmentant la plage horaire de distribution à plus de 12 heures par jour. Le taux de raccordement actuel est de 98% avec un linéaire global de 113000 km et une dotation journalière de 178L/jour/hab.
Pour ce qui est du programme d’assainissement, il n’a été prévu la réalisation de 60 STEP et lagunes d’une capacité épuratoire de 4 millions equ.hab ainsi que 6000km de collecteurs. En ce qui concerne l’hydraulique agricole, il a été prévu la réalisation de 32 grands périmètres d’irrigation totalisant une superficie de 232000 hectares ainsi que 219 retenues collinaires mobilisant un volume de 60 millions de m3 permettant d’irriguer 15000 hectares.
Pour la mise en œuvre de grand programme de SE le Président Abdelaziz Bouteflika, l’Etat a déployé de grands moyens financiers colossaux depuis 1999 qui s’élèvent à plus de 3600Milliards de DA (soit près de 47 Milliards de dollars USD). Tous ces efforts ont permis à notre pays d’atteindre les objectifs du Millénaire pour le Développement en matière d’alimentation en eau et d’assainissement.
L’Algérie est un des pays qui anticipe sur ce que sera le futur proche où la question de l’eau va être au cœur des conflits mondiaux. Lorsque le Président Abdelaziz Bouteflika inaugurait le 05 Avril 2011 le pipe transportant l’eau sur une longueur de de 750 km devant desservir environ 100000 habitants dans la capitale du Haggar et ses environs de Ain Salah à Tamanrasset à raison de 265 litres/hab/Jour à travers 1258 km de conduites. Ce fut un rêve qui venait d’être exaucé surtout que la nappe albienne à elle seule est estimée à 45000 milliards de m3 qui s’étend sur une superficie de 750000 km2. N’est-ce pas le verset coranique qui dit « Nous avons fait de l’eau la source de toute vie ».
Selon les chiffres des Nations Unies, un pays sur cinq connaitra une grave pénurie d’eau dans les vingt cinq années à venir. Le « stress hydrique » se proguirait dans chaque pays. C’est pourquoi la question de l’eau devient de plus en plus un enjeu stratégique crucial dans le monde. Selon la FAO, on estime plus de 230millions le nombre de personnes vivant dans les pays classés actuellement parmi ceux qui manquent d’eau dont la plupart se trouvent en Afrique, au Moyen-Orient, dans l’Afrique méditerranéenne et subsaharienne.
Selon les hydrologues qui acceptent la mesure selon laquelle 1700m3 par an et par personne est posée comme la limite entre richesse et pauvreté en eau. D’où une politique de rationalisation de l’eau contre le gaspillage de cette ressource vitale. C’est qui fait dire que « le climat gouverne le temps, la distribution contrôle la vie » pour altérer profondément les écosystèmes « l’Or bleu » en est la richesse qu’il faut préserver et savoir la gérer rationnellement.
B. H.