L’activité portuaire et les segments de la logistique et du transport maritimes tiennent aujourd’hui un rôle de plus en plus prépondérant dans le développement de l’économie nationale, en favorisant surtout la compétitivité du pays à l’export. Acteur majeur en ce domaine, DP World Djazair contribue grandement à faire évoluer et moderniser l’infrastructure portuaire nationale. Son directeur général, Samir Boumati, nous livre à travers cet entretien son analyse sur les évolutions que connaît ce secteur névralgique, tout en évoquant la stratégie de développement et d’investissements que déploie DP World Djazair pour conforter la modernisation des services maritimes et de la trans-logistique en Algérie.
Entretien réalisé par H. Nait Amara
DP World Djazair tient un rôle majeur dans le paysage portuaire en Algérie. Comment se déclinent ses principales activités sur le marché algérien?
A ce jour, les volumes que nous traitons en termes de trafic conteneurs représente pratiquement 57% du volume d’activité du port d’Alger et presque 26% du volume total au plan national. Nous avons entamé nos opérations en 2009 et au jour d’aujourd’hui, avec l’élan de développement, particulièrement les investissements opérés dans les technologies, les équipements, les formations modernes de nos staffs, nous arrivons à prodiguer un service très professionnel aux clients, en veillant à ce que le terminal ou le port en général facilite le commerce international et fluidifie le passage des marchandises et des informations y afférentes vers les ports. Nos activités se déclinent à travers les services portuaires, le traitement des navires et des marchandises, leur passage au niveau des ports et leurs livraisons vers les clients. Nous ambitionnons d’aller au-delà des grilles du port pour étendre notre activité dans les secteurs de la trans-logistique de manière générale afin d’apporter la qualité de service recherchée par les clients.
Quel rôle spécifique peut tenir DP World Djazair dans la concrétisation de la nouvelle stratégie mise en place par les pouvoirs publics pour promouvoir les exportations hors hydrocarbures ?
Ceci est d’abord lié à la qualité des services et à l’excellence des prestations prodiguées aux clients, de sorte à ce que le passage des marchandises soit le plus rapide et le plus facile possible. Ces services sont surtout liés à la logistique à partir des dépôts au port et du port vers la destination des navires, avec un maximum d’efficacité, particulièrement à la faveur de la digitalisation d’un certain nombre de process pour qu’ils soient optimaux afin de réduire à la fois les coûts et les délais. Aussi, le port doit se placer en premier lieu comme un vecteur de facilitation des exportations. D’ailleurs, je tiens à souligner que nous avons reçu des navires où nous avons traité pratiquement plus de 400 conteneurs à l’export, ce qui est quand même un challenge car c’est une première depuis plusieurs années. Nous ambitionnons désormais de passer de 4% des volumes d’exportations pleins à 10% dans les trois prochaines années.
Quels investissements a consenti ces dernières années DP World Djazair pour développer l’activité portuaire en Algérie ?
Nous avons d’abord investi dans la consolidation et la révision du design de l’infrastructure du terminal, car il fallait une infrastructure portuaire moderne. En second lieu, nous avons investi dans les équipements de manutention pour qu’ils soient à codage technologique afin de permettre la consolidation et l’efficacité des process. Enfin, il s’agissait aussi d’investir dans les produits numériques et les systèmes IT les plus modernes qui sont ainsi introduits et utilisés sur le terminal et permettent une efficacité et une traçabilité en temps réel de tous les mouvements au niveau du port. Mais le plus important à mon sens, est surtout l’investissement consenti dans la formation du personnel au plus haut niveau. Nous avons aujourd’hui de jeunes algériens qui ont fait les plus grands ports du monde et les plus grandes universités et instituts de management portuaire et qui dispensent même des formations en Afrique et ailleurs. L’élément humain est un vecteur extrêmement important pour justement se hisser aux standards internationaux.
Quelle place tient aujourd’hui la digitalisation dans les modes de fonctionnement et la stratégie de développement de votre entreprise ?
La digitalisation est une priorité de tout premier ordre, car elle permet une consolidation des ressources et des systèmes de traçabilité de toutes les activités au sein et au-delà du port, puisque nous sommes reliés à une connexion internationale pour avoir une planification optimale. Nous sommes engagés dans une amélioration continue de nos systèmes pour la gestion des activités portuaires et des services commerciaux associés à la reconnaissance des marchandises, la planification des opérations et les prestations prodiguées aux clients tant à l’intérieur qu’à l’extérieur du port.
Il s’agit également de pouvoir insérer le Port Community system ou ce que l’on appelle un système de guichet portuaire unique, qui commence d’abord par les ports pour aller par la suite vers les trades Community system, soit au niveau du système bancaire et au-delà, ce qui permet aussi une traçabilité optimale.
Comment le segment des transports et logistique contribue-t-il à booster les relations partenariales et commerciales ?
C’est justement de toute cette connectivité dont on a besoin. C’est ce que j’appellerai plutôt les mobilités, qui englobent de façon plus globale, les transports de marchandises et des passagers, mais aussi de l’information.
Ces mobilités constituent un levier très important dans le développement des relations commerciales à la fois dans le domaine souverain et à l’international. Elles permettent justement de pouvoir échanger et commercer selon les standards les plus efficients.
Aujourd’hui, le portefeuille portuaire algérien se développe de façon fulgurante avec les plateformes portuaires en chantier ou déjà exécutées, le management au niveau du port, mais aussi toute la chaîne de la trans-logistique tant sur la tranche littorale qu’au niveau des Hinterlands, avec les zones franches et les zones d’excellence logistique qui permettent de raffermir la puissance économique et l’attractivité du pays. Tout cela doit se faire dans des conditions optimales avec des process et des technologies qui permettent au pays d’être un acteur majeur dans le bassin méditerranéen et au-delà. Il faut souligner aussi que l’Algérie occupe une place géostratégique, car elle est à la porte de l’Afrique, particulièrement avec la zone de libre-échange continentale. Je pense que nous sommes sur la bonne voie pour que l’Algérie puisse être un acteur majeur dans la trans-logistique.
DP World gère des terminaux en Europe et ailleurs, tout comme en Algérie. Cela offre-t-il un avantage de plus pour vos clients ?
Absolument ! C’est d’ailleurs l’approche pertinente que nous adoptons aujourd’hui. DP World dispose dans son portefeuille de quelque 200 business units à travers le monde, que ce soit dans les ports, les zones franches ou les services logistiques et tout ce dont le client a besoin pour transporter sa marchandise d’un pays à un autre à travers tous les continents. L’idée est de pouvoir opérer des fusions entre différentes installations portuaires, logistiques, maritimes et digitales, de sorte à ce que l’on puisse offrir aux clients un service de bout en bout, mais aussi d’optimiser toutes ces opérations de commerce international dans un cadre plus efficace et le faire également à partir de l’Algérie pour les produits destinés à être exporter vers l’Afrique, l’Europe et autres. Il s’agit d’avoir un rôle de facilitateur pour contribuer à ce que ces produits puissent être placés dans les meilleurs délais, les meilleurs coûts et avec la meilleure traçabilité, ce qui constitue, à mon avis, une stratégie qui va beaucoup faire évoluer le business à l’export. A cela s’ajoute la force du réseau, qui peut être là où les connexions ne sont pas. Par exemple, nous sommes présents dans plusieurs régions en Afrique, notamment à Sokhna, Dakar, Maputo, Luanda, Berbera et dans d’autres pays. Nous contribuons ainsi à faciliter les opérations dans ces ports pour assurer une meilleure efficacité.
Quelle est votre évaluation de la situation du marché algérien sur lequel vous êtes présents depuis déjà plus d’une décennie ?
Nous avons beaucoup appris depuis 2009 et nous n’avons pas cessé d’investir. D’abord dans les équipements et les technologies, mais surtout dans la ressource humaine, où on se targue aujourd’hui d’avoir de jeunes managers algériens respectés de par le monde. Nous avons fait en sorte que l’installation du terminal soit des plus modernes afin de réduire les délais de séjours des navires. Avant, il pouvait y avoir parfois jusqu’à une quinzaine de navires qui attendaient en rade, tandis qu’aujourd’hui, il y a plus de surestaries et les navires de marchandises n’attendent pas plus de quelques heures sur le terminal. Les performances en ce domaine sont triplées et les navires grandissent en taille et il y a donc des réductions de coûts, puisqu’il y a une optimisation des lignes maritimes. Nous voulons évidemment donner avantage au pavillon national pour que ses bateaux soient priorisés en termes de traitement des opérations et pour parvenir à une contractualisation avec les lignes maritimes pour aller vers des systèmes de booking et de fenêtres d’accostage, tel que cela se fait à travers le monde. Il s’agit ainsi de faire en sorte que la destination Algérie soit plus efficace avec des navires plus grands ; que le fret maritime soit avantageux et que la performance des ports soit optimale pour réduire les délais, les coûts et les surestaries.
Qu’en est-il de la conformité aux exigences et normes de sécurité au sein de vos installations ?
La sécurité industrielle est sacro-sainte. C’est la priorité de toutes les priorités pour que les travailleurs et ceux qui commercent soient toujours sains et saufs et pour favoriser le «well-being», soit le bien-être au travail dans une culture d’entreprise à la fois plaisante et efficace. La question de l’environnement est également cruciale pour nous. Nous avons des indicateurs qui nous permettent de mesurer les émissions de CO2, la consommation des eaux et autres à un niveau international et nous ambitionnons d’arriver dans les prochaines décades à zéro carbone. La sûreté aussi fait partie de ces priorités. Nous sommes certifiés ISO 28 000 et C-TPAT « Customs-Trade Partenership Against Terrorism » ce qui offre un label au terminal d’Alger par rapport aux exigences internationales de sûreté.
Pour la sécurité industrielle, nous prévoyons aussi d’être certifiés ISO 45 000 très prochainement. Ce sont là autant de systèmes importants pour nous, afin d’optimiser la sécurité et d’être performants au quotidien.
H. N. A.