Le climat des affaires en Algérie connaît d’importantes évolutions positives ces deux dernières années, ont assuré des intervenants en finances et commerce international lors d’un riche débat sur le thème de « l’Évolution des dispositifs encourageant le commerce et l’investissement entre la France et l’Algérie», organisé à l’occasion de la 14e édition des «Rencontres Algérie», qui s’est tenue le 16 mars écoulé au siège de Business France à Paris.
Par notre envoyé spécial à Paris Hacène Nait Amara
L’amélioration notable de l’environnement de l’investissement en Algérie est favorisée en premier lieu par l’évolution positive du cadre macroéconomique et macro-financier du pays, à la faveur, notamment, du rebondissement des prix du pétrole, lesquels ont connu une contraction causée par la crise sanitaire du Covid-19. Dressant un constat favorable sur l’évolution de l’économie algérienne durant ces deux dernières années, Youcef Ghoula, Directeur général-adjoint de BNP-Paribas El Djazaïr, a d’abord tenu à préciser que les indicateurs économiques de l’Algérie «sont actuellement au vert, grâce non seulement au rebond des prix des hydrocarbures, mais aussi aux performances engagées par le Gouvernement dans d’autres secteurs, tels que ceux des services et de l’agriculture qui devient désormais un véritable levier de croissance». L’Algérie, a-t-il ajouté en ce sens, dispose également «d’une marge d’endettement importante pour pouvoir supporter d’éventuels chocs externes». Aussi, a-t-il analysé, le pays a confirmé «son orientation économique libérale» dans le sens où «l’acte d’investir est désormais consacré par la constitution et où les différences en termes d’avantages à l’investissement n’existent plus entre les investisseurs nationaux et ceux étrangers». Selon lui, la nouvelle loi sur l’investissement en vigueur en Algérie «offre d’importantes garanties aux investisseurs, notamment en termes de procédures de transferts de dividendes, de stabilité du régime d’investissement, ainsi qu’un droit de recours en cas de litige auprès d’une instance relevant directement de la Présidence de la République». De plus, relève le même intervenant, «le pays est en train de se numériser» et la nouvelle loi sur la monnaie et le crédit (LMC), actuellement en cours d’examen au Parlement, «intègre des évolutions technologiques importantes et de nouvelles dispositions pour améliorer la gouvernance du système bancaire». Dans cet ordre d’idées, il citera notamment la création envisagée d’un dinar numérique, l’ouverture du marché à de nouveaux opérateurs, tels que les prestataires de services de paiements pour favoriser le développement de la Fintech, et la mise en place prévue d’un comité de stabilité financière «pour orienter la gouvernance du secteur de manière à intégrer pleinement les évolutions technologiques». Exhortant les opérateurs français à venir investir sur le marché algérien, le DG-Adjoint de BNP-Paribas El Djazaïr a conclu en assurant en ce sens que la «liquidité bancaire et les opportunités existent», «le cadre juridique est à la fois stable et encourageant» et «l’Algérie est un pays urbanisé à plus de 80%». Autant d’arguments qui plaident ainsi, selon lui, en faveur de l’attractivité du marché algérien pour les investissements directs étrangers. Dans le même contexte, Réda Khedis, Directeur général du cabinet spécialisé dans le conseil juridique, RGS, a rappelé d’abord que la première chose qui a été décidée par le Président Tebboune après son élection en décembre 2019, était d’effectuer une évaluation des projets faisant l’objet de blocages administratifs. Par la suite, a-t-il ajouté, la Loi de finances pour 2020 est venue très rapidement répondre à certaines attentes des opérateurs économiques, notamment la levée de la règle 49-51, sauf pour certains secteurs stratégiques. Suivra en 2022, a-t-il enchaîné, la nouvelle loi relative à l’investissement qui va induire «une nouvelle stratégie de développement économique» basée sur trois principes consacrés, que sont « la liberté d’investir, la transparence et l’égalité devant les lois». En parallèle, a relevé le Directeur général d’RGS, ont été définis différents régimes d’avantages fiscaux et parafiscaux pour différents secteurs prioritaires pour la croissance économique, tels que l’industrie, l’agriculture, l’économie de la connaissance et autres. Ont également été établies, a-t-il relevé, des zones géographiques bien définies pour permettre une répartition plus équilibrée des investissements, tandis que pour les grands projets structurants, une nouvelle agence et un système de guichet unique ont été mis en place. S’agissant de l’évolution des procédures liées au contentieux, le même intervenant a estimé que «les magistrats algériens sont bien formés et que des mises à niveau des juridictions ont été désormais opérées». De son côté, Marie-Albane Prieur, directrice export au sein de la banque publique d’investissement française BPI France, a tenu à souligner de prime abord que pour «les entreprises établies en France, le marché algérien nécessite qu’on s’y prépare en amont, notamment en termes de sécurisation financière et de choix de partenaires». Il s’agit, a-t-elle développé, «d’un marché concurrentiel qui s’ouvre, mais qui oblige à avoir un avantage compétitif pouvant se traduire pour les entreprises françaises par un plan de financement au démarrage, qui va permettre d’avoir des ressources et d’être réactif pour remporter des contrats». Pour la directrice export de BPI France, «croire que le marché algérien est acquis pour les entreprises françaises et une erreur». Car, relève-t-elle, «c’est un marché à forte concurrence et c’est aux chefs d’entreprises d’être impétueux, flexibles et adaptables». Aujourd’hui, suggère-t-elle, «il y a un intérêt pour ce marché et créer de la co-industrialisation me semble nécessaire». S’agissant du rôle de BPI France en tant que banque d’investissement, la même responsable a indiqué notamment qu’un montant de «22 millions d’euros a été déployé sur l’Algérie durant ces quatre dernières années». Néanmoins, regrette-t-elle, «l’assurance-prospection, qui est un outil financier formidable, n’est pas encore assez utilisé par les chefs d’entreprises», tandis que, ajoute-elle, «nous avons bon espoir de pouvoir à l’avenir développer vers l’Algérie le crédit-acheteur qui est un moyen de paiement permettant de sécuriser les contrats». Autre enjeu majeur également débattu lors de cette rencontre, celui de la protection des droits de propriété intellectuelle, qui préoccupe souvent les investisseurs potentiels désireux de se déployer sur le marché algérien. A cet égard, François Kaiser, conseiller régional au sein de l’institut français de la propriété industrielle (INPI) a relevé d’emblée que pour une entreprise qui souhaite investir à l’international, «la stratégie de propriété intellectuelle se prépare bien en amont, qu’il agisse du marché algérien ou des autres marchés». Selon lui, l’Algérie dispose en ce domaine précis «d’une législation relativement semblable à celle française». Aussi, a-t-il souligné, «les autorités algériennes ont pris conscience que l’amélioration du climat des affaires nécessite à la fois de sécuriser les droits de propriété intellectuelle des investisseurs et de lutter contre le phénomène de la contrefaçon», qui touche, a-t-il dit, «de très nombreux secteurs, tels que le pharmaceutique, les cosmétiques, l’électronique et autres». En définitive, préconise le conseiller régional de l’INPI à l’adresse des opérateurs français, «il faut veiller surtout à se protéger en amont, avec des contrats de confidentialité et en déposant ses titres de propriété intellectuelle, en particulier lorsque l’on veut opérer des transferts de technologies ».
H. N. A.