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Karim Bibi Triki, Ministre de la Poste et des Télécommunications : « Le développement du numérique a besoin de partenariats gagnant-gagnant»

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Développement et modernisation de l’infrastructure de communication, amélioration de la qualité de connexion et du débit internet, intensification du déploiement de la fibre optique, extension de la portée des réseaux mobiles aux zones enclavées… autant de chantiers entrepris par le ministère de la Poste et des Télécommunications sur lesquels son premier responsable, Karim Bibi Triki, revient dans cet entretien qu’il a bien voulu accorder au magazine Indjazat. Il y évoque également les efforts consentis pour la promotion de l’économie numérique dans notre pays et par la même occasion le rôle de la digitalisation dans la stratégie sectorielle d’amélioration des services postaux proposés aux citoyens.

Interview réalisée par Hacène Nait Amara

Comment se présente aujourd’hui l’infrastructure télécom du pays. Evolue-t-elle suffisamment de façon à répondre aux besoins des opérateurs dans ce domaine et aux attentes des clients en la matière ?
L’Algérie dispose d’une infrastructure de télécommunications importante, avec un maillage en communications électroniques couvrant l’étendue du territoire national. L’Etat veille, dans le cadre de la mission de service public à assurer, de façon équilibrée et équitable, la satisfaction des attentes des citoyens (particuliers, opérateurs économiques) en matière de téléphonie fixe, mobile, et dans le domaine de la connectivité internet. Des insuffisances sont, toutefois relevées, et les performances de nos réseaux sont perfectibles, appelant des efforts supplémentaires d’amélioration et d’optimisation des capacités existantes, en adéquation avec les besoins de développement de notre pays, et en adaptation avec les mutations technologiques en perpétuelle accélération dans le monde.
Notre département ministériel concentre son action, en droite ligne des axes directeurs du plan d’action du Gouvernement, sur l’élaboration, le suivi et l’accompagnement de la mise en œuvre efficiente de la stratégie nationale de développement et de modernisation des infrastructures de télécommunications. Cette ossature infrastructurelle forme un socle dynamique évolutif indispensable à la généralisation et l’appropriation des usages des TIC.
Les opérations achevées, en voie de réalisation ou projetées dans la substance du plan d’action sectoriel, permettront, à terme, une amélioration perceptible de la qualité de connexion et du débit internet offert aux citoyens, ainsi que le renforcement de la résilience du réseau national de télécommunications fixe et mobile.

Quels sont actuellement les principaux chantiers lancés par le secteur ?
En vue de répondre de façon optimale aux attentes des citoyens, organismes et institutions économiques privées et publiques, en matière de téléphonie fixe et d’internet, notre action est axée dans le volet connectivité, d’une part, sur la diversification des liaisons et des points d’accès au niveau international (câbles sous-marins), ainsi que sur l’amélioration des capacités de la bande passante internationale. Et d’autre part, sur la modernisation et la sécurisation du réseau national d’accès à internet, notamment à travers l’intensification des opérations de déploiement de la fibre optique via la technologie FTTh au niveau des nouveaux pôles d’habitations, en sus de la modernisation et l’optimisation progressive du réseau d’accès existant réalisé à partir de 2004 en cuivre, particulièrement dans les villes à grande concentration urbaine, à l’image d’Alger, Oran et Constantine. La téléphonie mobile occupe, également, une place prépondérante au cœur de la feuille de route du secteur. La démarche que nous avons adoptée consiste en l’accompagnement des opérateurs, notamment dans le volet administratif, mais aussi l’optimisation de l’utilisation du spectre de radiofréquences disponible, en faveur de l’amélioration continuelle de la qualité de couverture. Une attention particulière est accordée, par ailleurs, à l’extension de la portée des réseaux mobiles aux zones enclavées, notamment les localités rurales, les régions de notre grand sud et les axes routiers névralgiques, en mobilisant les ressources du mécanisme du service universel. La concrétisation de ces objectifs de rehaussement de la qualité des liaisons mobiles s’appuie, aussi, sur la poursuite du programme de déploiement de la 4G. L’exploitation des capacités satellitaires du satellite ALCOMSAT-1, intervient en appoint aux efforts de renforcement des capacités que je viens d’aborder.


Etant un acteur principal de l’écosystème, concrètement, quelles sont les mesures à prendre pour promouvoir l’économie numérique et le paiement électronique?

Le Gouvernement a adopté, en guise de traduction concrète des engagements pris par Monsieur le Président de la République dans le volet économique, au deuxième chapitre de son plan d’action intitulé : « Pour la relance et le renouveau économiques », une approche intégrée d’accompagnement de l’accélération de l’inclusion financière, ciblant la réduction du recours à la liquidité.
La démarche en question repose sur la généralisation de l’utilisation des moyens de paiement électroniques dans les transactions entre agents économique (consommateurs/entreprises-entreprise/entreprise/réseau bancaire et postal), en veillant à la stricte observance des exigences édictées en matière de sécurité, de fiabilité et de flexibilité.
La promotion de l’économie numérique dans notre pays, dont le paiement électronique et le commerce électronique constituent deux piliers cardinaux, requiert non seulement une collaboration et une coordination agissante entre l’ensemble des secteurs et organismes publics, mais aussi la contribution de tous les acteurs, sphère privée incluse.
Les organisations professionnelles auxquelles adhèrent, commerçants, artisans et opérateurs économiques en général, ainsi que les acteurs de la société civile issus des associations de défense des consommateurs, sont appelés à jouer un rôle actif dans ce processus.
L’accroissement de la participation du segment numérique au sein de notre économie exige, d’un autre coté, la concrétisation de partenariats gagnant-gagnant entre tous ces acteurs.
La conclusion, en décembre 2021, sous la haute supervision de Monsieur le Premier Ministre, d’une importante convention entre Algérie Poste et le Groupement d’Intérêt Economique Monétique (GIE Monétique), et la Société d’Automatisation des Transactions Interbancaires et de Monétique  (SATIM), visant la généralisation des services de paiement électronique en ligne, grâce à l’interopérabilité entre les plateformes monétiques des réseaux postaux et bancaires, représente, à cet égard, une initiative de partenariat fructueuse à encourager l’essaimage.
Les TIC, dont notre secteur veille à la promotion de l’utilisation, constituent, au cœur de cette stratégie, un support favorisant l’accélération de l’évolution de l’économie et l’administration, ainsi qu’un atout indéniable d’insertion des citoyens dans la société de l’information, mais au-delà, un des leviers essentiels sur lesquels repose l’approche de diversification de l’économie nationale, car accompagnant la création de nouvelles activités à valeur ajoutée et d’opportunités d’emploi, en plus d’appuyer l’émergence de nouveaux métiers étroitement liés au domaine de l’innovation technologique.

L’amélioration de la qualité des services et le renforcement de la vitesse des flux Internet demeurent pratiquement l’essentiel des revendications des usagers. Quels sont les efforts déployés par votre département pour prendre en charge ces aspects ?

Avec l’engouement grandissant constaté chez les citoyens pour les TIC et leurs applications sur l’internet, les besoins de consommation du contenu numérique enregistreront une courbe d’évolution ascendante pour les années à venir. Ajoutés aux besoins exponentiels exprimés par les acteurs de la sphère économique, les exigences formulées vis à vis de nos réseaux de télécommunications et les performances qu’ils génèrent, sont sans cesse revues à la hausse.
Notre secteur veille continuellement à l’accompagnement des opérateurs des télécommunications, dans la démarche résolue de satisfaction des attentes des abonnés en termes de renforcement et d’amélioration de la qualité de la connexion internet.
C’est dans le cadre de cette dynamique de transformation vers les standards qualité/cout, que l’opérateur public Algérie Télécom a procédé à l’augmentation du débit internet pour ces clients. Plus de 2 millions d’abonnés ont, en effet, vu leur débit doubler au cours de l’année 2021, dans une première étape, passant de 2 Mbps à 4Mbps, puis à 10 Mbps dans une 2ème étape. Les clients disposant d’un débit de 10 Mbps, sont passé, quant à eux, à 20 Mbps.
A souligner que cette augmentation n’a engendré aucun changement dans les tarifs pour les clients concernés.
Pour leur part, les clients possédant un abonnement de 20 ou 100 Mbps ont préservé dans le cadre de cette opération, le même débit, avec une réduction de tarifs.

En matière de qualité de service toujours, que faudrait-il faire pour développer la qualité des prestations fournies par la Poste ?

La stratégie sectorielle d’amélioration des services postaux proposés aux citoyens, s’articule autour de trois axes principaux : la numérisation des services ; le développement des ressources humaines ; et le renforcement des moyens et des infrastructures.
Notre département ministériel supervise dans ce cadre la numérisation, par Algérie poste, de l’ensemble des prestations au niveau des bureaux de poste, de manière à les rendre plus accessibles et plus simples pour les clients, avec le concours des TIC.
La ressource humaine fait l’objet d’une attention particulière dans notre approche. En effet, un riche programme de formation a été élaboré et mis en œuvre au cours de l’année 2021, touchant 8 716 travailleurs d’Algérie poste, et couvrant les diverses spécialités postales, avec pour objectif l’actualisation des connaissances et le rehaussement continu des compétences professionnelles des agents postaux.
En termes d’infrastructures, le réseau postal a été renforcé en 2021 avec 94 nouveaux bureaux de poste dont 21 nouvellement construits et 73 locaux reconfigurés en bureaux de poste, ajoutés à la réhabilitation de 149 bureaux. Le parc des guichets automatiques constitué de 1 400 unités a été renforcé, au cours de cette année avec 600 (GAB) supplémentaires.
Il convient d’indiquer, que le réseau postal algérien couvre le territoire national avec 4 092 bureaux de poste, dont 65 bureaux de poste itinérants, 74 centres de dépôt et de distribution, ainsi qu’un centre de tri national et international.
Notre secteur tient également à faciliter l’accès des personnes aux besoins spécifiques aux services postaux, à travers un certain nombre de mesures, telles que l’aménagement de rampe d’accès adaptées, et la réservation de guichets pour cette catégorie. Les personnes âgées bénéficient, également, de prestations adaptées, notamment le dispositif de procuration spéciale institué et actionné lors de la période de lutte contre la COVID-19 au profit des retraités et des ayants droits, leur permettant de percevoir leurs pensions à travers un proche, sans déplacements et désagréments.
Les prestations financières fournies à cette catégorie d’usagers ont été, pour rappel, améliorées avec les réaménagements apportés à l’agenda de retrait des pensions, dans le sens d’une plus grande fluidité et facilitation de la fourniture du service public à nos concitoyens, avec une meilleure répartition des jours de retrait, sur la base du premier numéro du CCP.
En matière d’amélioration des conditions d’accueil des citoyens, il y a lieu de rappeler lancement du nouveau système de gestion des files d’attente  permettant l’amélioration de l’organisation du parcours des usagers à l’intérieur des bureaux de poste et la fourniture des services dans les meilleures conditions d’accueil et d’orientation. Le système constituera, après sa généralisation sur l’ensemble du réseau postal, un outil efficace de reporting, de suivi et d’évaluation des rendements de chaque bureau, guichet et agent de poste.
Par ailleurs et dans le volet accompagnement des jeunes demandeurs d’emplois, Algérie Poste a procédé, avec l’Agence Nationale de l’Emploi (ANEM), en février 2022, à la conclusion d’une convention sur la fourniture du service des « virements multiples », qui consiste à assurer le virement au profit de cette catégorie de citoyens, sur CCP de l’allocation chômage au niveau des établissements postaux ou par GAB pour les clients titulaires de carte Edhahabia.

Qu’en est-il de la certification électronique dont l’entrée en service n’est pas encore effective ?

Il est mondialement admis que les e-services (e-gouvernement, e-commerce, e-éducation, e-banking…) constituent aujourd’hui des indicateurs importants du niveau de développement économique d’un pays. Les systèmes de certification et de signature électroniques, soubassement technologique indispensable au déploiement de ces services, sont perçus en tant que facteur attractif des investissements, compte tenu de leur contribution à l’amélioration du climat des affaires. Ils sont devenus, dans ce sillage, un élément de confiance accompagnant la garantie des exigences de base nécessaires à la sécurité des échanges en ligne entre les principaux acteurs de la transformation numérique et de la création d’opportunités d’emplois dans l’espace dit des nouveaux emplois pour l’innovation.
Les services de certification et de signature électroniques ont été, pour rappel, officiellement lancés en Algérie en mars 2021, à l’initiative de notre secteur, en aboutissement du processus technologique de concrétisation du plan national institué en vertu des dispositions de la loi n°15 -04 du 01 février 2015 fixant les règles générales relatives à la signature et à la certification électroniques. Ce processus a été mené en conformité avec les normes d’audit du standard WebTrust attribuées aux autorités de certification électronique.
L’Autorité Gouvernementale de Certification Electronique (AGCE), est chargée d’offrir des services de signature et de certification électronique au profit des institutions et organismes publics, lesquels sont clairement définis par la Loi n°15-04. Ces services permettent à ces intervenants selon plusieurs approches et selon les besoins de chacun, d’intégrer rapidement à moindre cout les avantages de la certification et de la signature électronique.
E-Tawki3 est un exemple de service que l’AGCE propose à ces acteurs. Cette prestation permet la dématérialisation totale et sécurisée de tous les échanges documentaires (Création de flux d’échange documentaire) faisant passer ces intervenants de manière très rapide au mode zéro papier, dont l’intérêt n’est plus à démontrer notamment sur les plans écologique et économique, avec une réduction de la durée du processus des échanges des documents et la vérification de leur authenticité et intégrité.
Un autre service très important que l’AGCE preste exclusivement au profit des institutions et organismes publics, c’est le service d’Autorité d’Horodatage. Cette prestation fournit une preuve de poids juridique authentifiée et irréfutable pour les transactions, les documents et les signatures numériques.

Beaucoup d’opérateurs économiques souhaitent investir dans les télécoms mais disent être confrontés à des difficultés. Comment faciliter l’investissement dans le secteur ?
Le secteur a fournis des efforts concrets pour faciliter l’investissement dans les TIC. Notre approche d’encouragement et d’incitation des acteurs de cet écosystème à l’investissement créateur de services à valeur ajoutée dans le champ des communications électroniques, s’appuie sur deux volets complémentaires. Le premier est relatif à la facilitation et l’allègement de l’aspect administratif. Le second a trait à la coopération et la coordination avec l’ensemble des parties prenantes au processus de modernisation par les TIC dans notre pays.
S’agissant du volet administratif, lequel est étroitement lié à la consolidation du cadre juridique, notre secteur, a piloté les différentes étapes du processus aboutissant à la publication du décret exécutif n° 22-39 du 10 janvier 2022 fixant les conditions de délivrance de l’autorisation générale pour l’établissement, l’exploitation et/ou la fourniture des services de communications électroniques au public ainsi que les montants de la contrepartie financière, des redevances et de la contribution annuelle y afférentes.
Le texte en question a été initié en application des dispositions de la loi n° 18-04 du 10 mai 2018, fixant les règles générales relatives à la poste et aux communications électroniques, avec pour but d’assurer la stabilité du capital investi par les opérateurs économiques, et la transparence nécessaire. Notre approche à travers ce nouveau texte, est motivée par la volonté de contribuer à l’amélioration de l’attractivité de notre pays vis à vis des investissements étrangers et nationaux dans le segment des communications électroniques, particulièrement en faveur de l’essaimage des services tels que :
la fourniture d’accès à Internet ; la commutation de la voix via internet (VoIP) ; les communications électroniques interactives avec tarification complémentaire, y compris les services Audiotex ; la localisation et/ou le positionnement par radio via satellite, ainsi que les services de géo localisation par radio ; l’hébergement et le stockage des données dans le cadre du cloud computing; et enfin les centres d’appels. Concernant le deuxième volet inhérent à la concrétisation de partenariats intersectoriels, notre département ministériel a initié, en collaboration avec le Ministère délégué auprès du Premier Ministre, chargé des Micro-entreprises, la signature et la mise en œuvre d’une convention cadre visant le développement et l’encouragement des micro-entreprises ayant bénéficié du dispositif de l’Agence Nationale d’Appui et de Développement de l’Entreprenariat (ANADE).
H. N. A.

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