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Smail Chikhoune, président du Conseil d’affaires algéro-américain (USABC) : « Les entreprises américaines commencent réellement à s’intéresser à Algérie »

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La conjoncture politique et économique dans laquelle se trouve actuellement l’Algérie ne semble pas constituer un obstacle majeur pour bon nombre d’entreprises américaines. Bien au contraire, elles ne veulent plus de cette attitude d’attente passive, adoptée habituellement face à ce genre de situation. Elles souhaitent se positionner dès maintenant sur le marché algérien, apporter une contribution active à la diversification de l’économie nationale et surtout marquer clairement et de la manière la plus forte leur engagement de coopérer avec les Algériens, même durant les moments les plus difficiles. C’est, en somme, ce que Smail Chikhoune, président du Conseil d’affaires algéro-américain (USABC), a tenté de mettre en évidence dans cet entretien, accordé en marge de la 52ème édition de la Foire internationale d’Alger.

Entretien réalisé par Hamid Mohandi

Au cours des dernières années, les États-Unis d’Amérique ont démontré une réelle volonté de prendre part et de manière beaucoup plus active à la diversification de l’économie algérienne. Les entreprises américaines sont présentes aujourd’hui dans le pharmaceutique, la construction, le service géologique, l’agriculture et l’hôtellerie. Est-ce une véritable ère nouvelle qui s’ouvre pour les relations algéro-américaines ?
Effectivement ! Mais avant de répondre à votre question, j’aimerais remonter un peu dans l’histoire pour dire que les relations algéro-américaine ne datent pas d’hier, elles remontent à 1795 avec la signature du premier accord d’amitié entre les deux pays. Après l’indépendance, en 1964 plus précisément, Pfizer s’installe en Algérie et ouvre la voie à d’autres entreprises qui se sont orientées à partir du début des années 80 vers le secteur des hydrocarbures. Puis, il y a eu une focalisation particulièrement forte sur secteur pour la simple raison que l’Algérie est restée jusque-là méconnue des Américain, notamment en l’absence d’un secteur touristique dynamique et attrayant en mesure de mettre en évidence les opportunités et le potentiel dont nous disposons en matière d’investissement et d’affaires.
Cette situation a été davantage exacerbée en raison de l’absence d’organisations et institutions devant faire connaitre et promouvoir l’Algérie comme une destination intéressante pour les investissements américains et un partenaire commercial de choix dans divers autres secteurs outre celui des hydrocarbures. Il faut attendre 2002 pour que les choses évoluent positivement avec la création du Conseil d’affaires algéro-américain.
Aujourd’hui, les Américains commencent réellement à s’y intéresser parce qu’ils sont dans l’obligation d’aller chercher de nouveaux leviers de croissance en dehors de leurs frontières, en raison du ralentissement économique auquel est confronté leur pays depuis quelques années. Autrement, ils préfèrent tirer le meilleur parti de l’accroissement et du dynamisme de leur commerce interne. L’Etat de la Californie est, à titre d’exemple, la 7ème puissance économique mondiale. C’est pour vous dire qu’ils étaient en mesure de se contenter des opportunités commerciales offertes sur le marché local et limiter leur commerce extérieur aux seuls pays membres du G7 ou du G8.
Ce n’est que lors de la dernière récession économique que les PME américaines commencent à étendre leur champ d’action à d’autres régions dans le monde, à l’exception de l’Afrique qui demeurait en dehors de cette nouvelle réorientation.
Mais maintenant, la donne a changé. Le taux de croissance est beaucoup plus élevé en Afrique qu’en Europe et il est encore meilleur que celui enregistré en Amérique latine et dans certaines régions en Asie, ce qui a incité les Etats-Unis à revoir sa politique en vue de se redéployer sur le continent africain.
Bien que cette réorientation vienne un peu tard, puisque d’autres puissances économiques se sont déjà installées en Afrique, dont certaines ont même pris une énorme longueur d’avance sur eux, mais il en reste toujours des opportunités d’affaires à saisir et des secteurs d’activité à exploiter. Et dans cette optique, l’Algérie se trouve en bonne posture pour tirer parti de cette nouvelle réorientation, car notre pays regorge d’importantes opportunités, pratiquement sans dettes et dispose de réserves assez confortables, et avec à la clé plusieurs projets à mettre sur pied. C’est ce qui explique ce regain d’intérêt pour notre marché. Cela a pris un peu de temps, mais aujourd’hui les Américains s’intéressent de plus en plus à l’Algérie. Il y a vraiment un engouement. C’est un peu dommage, car au moment où nous avons réussi à voir cet engouement, l’Algérie se trouve confrontée à un petit ralentissement économique qui est dû à la conjoncture actuelle.

Justement, pensez-vous que cela va freiner cette nouvelle dynamique et quelle était la réaction des investisseurs américains par rapport à cette conjoncture ?
Bien évidemment, cette situation va ralentir cet élan. Certains préfèrent attendre jusqu’à ce que les choses soient bien claires en Algérie et à ce qu’il ait une vision économique réelle et à long terme, certains d’autres ne veulent plus rester dans cette attente passive. Ils connaissent très bien la situation, mais ils sont venus participer pour la première à la Foire internationale d’Alger. Ils nous ont dit qu’ils veulent connaitre ce pays, se positionner sur le marché et marquer clairement leur engagement de travailler avec les Algériens, même durant les moments les plus difficiles. D’ailleurs l’accord signé entre Bear Manufacturing et Tassili SPA en est la parfaite illustration. Il s’agit d’un aspect très positif, car les négociations se sont abouties sur un accord au bout de trois jours seulement de discussion, ce d’autant plus qu’il s’agissait de l’implantation d’une usine de production d’équipements de forage, ce qui implique systématiquement le transfert technologique. Nous pouvons maintenant nous targuer d’avoir une success-storie qui a conclu un important partenariat lors de sa première visite en Algérie. Il s’agit pour nous d’un argumentaire solide et convaincant qui pourrait inciter d’autres entreprises à venir investir en Algérie en dépit de la situation actuelle, marquée par un manque de vision sur ce que va être la future économie algérienne sous le prochain Président et le prochain gouvernement. Ceci dit, sur le plan politique, les Américains sont impressionnés par le caractère pacifique des marches et de la réaction des autorités à cela, ce qui a donné une très belle image de l’Algérie. Il s’agissait pour eux d’un fait inédit, du jamais vu auparavant dans d’autres pays. Je suis persuadé que nous allons les intéresser encore davantage.

La perception des Américains à l’égard de l’Algérie s’est améliorée. Elle représente une avancée positive qui va surement encourager le Conseil d’affaires algéro-américain à mettre les bouchées doubles pour en tirer profit de cette nouvelle donne. Peut-on avoir un aperçu des efforts à déployer dans ce sens à l’avenir ?
La prochaine mission du Conseil d’affaires algéro-américain est prévue pour le mois de septembre prochain. Nous allons participer à une conférence internationale (Gastech) sur l’industrie des gaz, de pétrole liquéfié et du gaz naturel qui aura lieu à Houston. Sonatrach sera également présente à cet évènement afin de présenter les opportunités qu’offre le secteur algérien des hydrocarbures.
Nous allons ensuite organiser en novembre un important évènement à Alger sur le secteur du recyclage (l’économie circulaire) et les énergies renouvelables. C’est une conférence de deux jours avec la participation d’un nombre important d’experts américains. Nous allons essayer d’étudier les voies permettant de soutenir et aider les startups algériennes exerçant dans le domaine du recyclage avec le concours des programmes internationaux-Banque Mondiale et FMI- ou par le biais de certaines fondations et corporations américaines. Mais avant cette conférence, nous allons ramener au mois d’octobre prochain le maximum d’entreprises agricoles américaines pour participer à un Roadshow et sillonner pendant une semaine les wilayas d’Oran, Mostaganem, Relizane, Mascara, Ain Defla, Blida, Beskra, El Oued, la région d’El Ménéa avant de finir par Annaba. Cela va leur permettre d’avoir un contact direct avec les agriculteurs algériens et avec les différentes chambres agricoles et par la suite nous allons inviter ces derniers aux USA. Au jour d’aujourd’hui, une vingtaine d’entreprises américaines ont d’ores et déjà accepté notre invitation.

Apparemment, l’échec du premier partenariat algéro-américain dans le secteur agricole (la ferme-pilote d’élevage d’El Bayadh ) n’a pas du tout dissuadé les autres opérateurs…..
Pas du tout. Le projet était le premier du genre. Il est actuellement à l’arrêt. L’idéal serait qu’il soit immédiatement mis sur pied et opérationnel, mais il faut savoir qu’un partenariat est en quelque sorte un mariage entre deux compagnies, cela peut réussir comme il peut aboutir sur un divorce. Les choses ne tournent pas comme prévu pour ce projet, mais entre-temps d’autres entreprises souhaitent réellement venir prospecter le marché algérien. Ils trouvent que notre politique agricole est très avantageuse et qu’ils leur suffiraient de trouver un partenaire sérieux et fiable.
H. M.

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